La contrebande de l’ivoire de Minkébé au Nord-est du Gabon est un phénomène s’inscrivant typiquement dans le cadre de l’économie criminelle transétatique. Elle s’adosse sur un espace marginal de par l’impénétrabilité du massif forestier en déficit de gouvernabilité. La contrebande est le transport illégal de marchandises au travers de la frontière. L’ivoire des éléphants de forêt au Gabon, qui est interdit de commerce par la CITES depuis 1989, est la cause de l’abattage illégal de pachydermes. Ce braconnage a considérablement réduit la population d’éléphants dans le bloc forestier de Minkébé. Près de 40000 dans les années 1990, la population totale des éléphants de Minkébé compterait désormais moins de 9000 individus. Comment se structure, dans l’espace, la contrebande de l’ivoire à partir de Minkébé ? Nous verrons que la situation et le site géographique du bloc forestier accroissent la pression sur le parc. L’horogenèse de la dyade Gabon/Cameroun est révélateur de l’attrait du territoire au Sud de la rivière Ayina du fait notamment de la présence de l’ivoire. Plusieurs sociétés humaines habitant le Nord du Gabon se sont progressivement rendues indispensables à l’activité de contrebande à l’instar des chasseurs et guides pygmées Baka ou des Haoussa originaires du Cameroun et rompus au transit illégal de l’or blanc de Minkébé. Deuxièmement, le tronçon de frontière sur laquelle s’adosse le parc est effectivement un élément structurant du négoce illégal d’ivoire. Poreux et peu surveillé, il permet à la contrebande d’ivoire à Minkébé d’être inscrite dans une logique régionale au gré de la déliquescence de l’autorité des entités nationales et régionales qu’arpente le contrebandier.