N. Ou-qu, il y ait des campagnes de dépistage à plusieurs intervenants de santé, quoi. Les psychologues, les infirmières psychiatriques, les médecins généralistes. Qu'on se voie, qu'on en parle. C'est toujours le problème de dépistage en milieu libéral, c'est qu'on n'a pas vraiment le temps

J. Vu, un médecin qui me parlait du dépistage des IST. C'est vrai qu'on pourrait se réunir avec les intervenants du canton pour en parler. Là, je voyais, dans la campagne de dépistage qu'ils vont faire, il y a les IST, les dents, il pourrait y avoir aussi... Ca s'adresse plutôt aux saisonniers. C'est vrai que c'est des gens qui sont dans la précarité souvent

. Qu-'on-vienne-faire-un-petit-tour-et-en-parler, C'est vrai que les femmes battues, c'est un peu rigolo de dire les femmes battues, mais les violences conjugales, il y en a. Qu'on puisse leur en adresser aussi, ça serait bien

P. Si, en ai une qui est en train de divorcer. C'est une situation pas toute simple. En plus, je vois le mari aussi, enfin l'ex-conjoint

P. Oui and . Qu, Je me souviens d'un gars du coin qui est bourré de fric, qui vit comme un pauvre malheureux parce qu'il est rapia comme pas deux, et il s'est ramené une Malgache, une petite jeune qui a 30 ans de moins que lui Et alors une fois, elle vient me voir. Moi, dans une autre vie, j'ai été mariée à un Africain, donc il y avait à la fois une complicité de femme et une complicité parce que je connais bien les Africains, elle le savait. Donc, elle est venue me voir en disant : « Ouais il voulait m'obliger à avoir une pénétration anale, moi j'ai pas voulu ». Il partait régulièrement à Madagascar, où il passait 2-3 mois et où il s'envoyait en l'air avec des petites jeunes de 12 ou 14 ans et il disait « Si tu fais pas ça, d'abord là-bas, ils le font alors je vois pas pourquoi tu le ferais pas toi, et puis si c'est comme ça, je te fais pas ton certificat d'hébergement et tu n'auras plus de carte de séjour. » Elle me raconte ça, je lui dis : « Faut pas te laisser faire ». Elle avait du travail en France, Après, j'ai l'impression, soit que c'est très loin, soit que c'était un peu déconnecté, à ce moment-là, de mes réalités professionnelles. Je n'en sais rien. C'est vrai que du coup, ça ne m'a pas laissé autant de traces que j'aurais souhaité que ça m'en laisse. Je pense que l'on peut faire mieux quand même, parce que l'histoire du dépistage systématique, j'ai l'impression qu'on ne m'en a jamais parlé pendant les cours, de demander systématiquement, d'aborder ça à chaque consultation. On nous a appris à faire les certificats de coups et blessures, Mais par contre, les sévices physiques c'est différent Moi, je ne me rappelle pas, en termes de dépistage, qu'on en ait parlé comme ça en cours

. Arrive-parce-qu-'ils-le-disent-implicitement, Il y a quand même des petites choses... Moi, j'ai eu en consultation un monsieur qui me disait, qui me l'a dit : « Je suis irritable ». Il y a des choses comme ça où tout d'un coup on sent que, Je suis irritable contre ma femme

. Je-vais-creuser-un, ils sont déjà dans une telle agressivité verbale, quand je me dis : « Ca doit se passer bizarrement », que quand on creuse, on augmente l'agressivité verbale. Il n'y a que sur certains points. Par exemple, le monsieur dont j'ai parlé précédemment, où j'ai pris ça comme un appel à l'aide, à l'entendre : « Je sens bien au relationnel que je ne me comporte pas bien avec ma femme ». Celui-là, je l'entendais bien comme ça

. .. Autant-les-autres-la-réactivité-et, quand j'embraye sur ça, je trouve que ça augmente l'agressivité dans la consultation, ils augmentent le ton Du coup, je n'ose pas aller plus loin. Verbalement, ça devient même assez agressif en consultation

. Oui, ça va mal se passer, ça pourrait même déraper Je me dis « Stop Je préfère rester un petit peu en retrait sur ça, et me dire : ce n'est pas le moment, ni l'endroit, ni moi. C'est pas évident, mais il y a des moments où je préfère interrompre, parce qu'ils deviennent vraiment agressifs, et je préfère du coup ne pas plus creuser, et me dire.... Voilà. C'est moche, mais voilà, on a l'impression que ça va déclencher encore plus de violence, d'agressivité verbale, physique même, si on commence à dire : « Avec votre femme, vous réagissez comment ? Est-ce que vous avez l'impression que vous êtes facilement, physiquement agressif ? Est-ce que vous avez la main un peu leste ? » On peut aborder plus facilement avec des gens qui reconnaissent avoir un problème avec l'alcool, ça m, Si je continue

. Après, si je sens que ça va le faire Même si je sens que ça va pas le faire, au moins je leur en parle, je leur dis que c'est illégal, que c'est interdit, que c'est aggravé par le fait que ce soit entre époux, entre conjoints et du coup, après, je leur dis de porter plainte, Si vraiment c'est un truc où il faut vraiment porter plainte : « Je vous fais le certificat, vous en faites bien ce que vous voulez

. Oui, Puis je sais aussi, quand on porte plainte, du coup il va y avoir une enquête qui va se faire, donc, du coup, ça va être encore plus difficile pour la femme qui est dans sa famille. Donc, voilà, je leur explique un peu ça, et puis après je les oriente

. Si-vraiment-c-'est-difficile, je les oriente vers l'avocat ou l'assistante sociale pour qu'elle puisse aussi donner des renseignements plus précis. Et puis sinon je leur dit : « On essaie de trouver la solution

. Non, est pas possible du tout, je vais aller les orienter vers une assistante sociale ou un avocat J'en avais une qui était partie de chez elle avec ses enfants et qui n'avait pas fait du tout de déclaration. Ca faisait un peu abandon de domicile, alors je lui disais : « Faut quand même vous méfier, parce que votre mari peut porter plainte contre vous parce que vous êtes partie avec les enfants. Il faudrait que vous passiez à la gendarmerie dire que vous êtes partie du domicile parce qu'il vous fait peur, parce que ci, parce que ça Au moins faire une déclaration comme ça ». J'essaie toujours de les orienter vers un truc un peu légal, un peu officiel. Et puis après, elles sont dans la merde, du coup je les envoie ensuite à l'assistante sociale et puis à l'avocat pour gérer ça, Après

C. .. Je-les, mais pour dire les noms, je n'y arriverais pas, donc en fait, je vais sur Internet pour les rechercher

E. .. Non, Si le mari est là, si les enfants sont là, aussi, mais sinon

. Non, est leur problème, c'est complètement leur problème. Moi, je leur donne les clefs, et après, qu'elles les utilisent ou ne les utilisent pas, c'est elles qui font ce choix-là

J. Après and . Les-oriente-de-téléphone, Mais moi, mon implication s'arrête là Si elles décident de ne rien faire, c'est leur choix et puis voilà Après, c'est comme ça pour tout et entre autres, elles ont des grandes phases de déni, et puis tout d'un coup elles vont vouloir faire quelque chose et puis après, le mec va être tout cool, et ça va recommencer. Elles vont se dire : « Ah ben finalement, il a changé », et puis elles vont recommencer. C'est comme ça. Moi, si je suis contrariée si elles se remettent avec, je m'en sors plus. C'est vraiment leur problème à elles. Moi, je suis là pour les orienter, mais je ne suis pas là non plus pour les obliger à le faire. Elles sont majeures. Le mec n'est pas devenu comme ça du jour au lendemain. Même si ça se déclare au moment de l'accouchement, c'est vrai qu'il y a quelque chose qui apparaît à ce moment-là, souvent il y a des trucs avant qui leur disent qu'il n'était pas le prince charmant non plus. Voilà. Elles choisissent de faire ça

. Oui, . En-fait-de-douter,-en-fait, . Si-elle-me-dit-un-truc, . Et-moi-je-doute, and . Ça-ne-change-rien, Enfin, des fois, c'est vrai, je me dis : « Est-ce qu'elle me dit la vérité ? » J'en sais rien du tout en fait. C'est pourquoi, les certificats, je les fais toujours en disant : « la patiente me dit que » Je ne fais jamais des certificats autres que très neutres. Voilà. Donc, après, quand elle me dit quelque chose, je réagis en fonction de ce qu'elle me dit Elle me dit, j'y crois, j'y crois pas, à la limite, ce n'est pas mon problème. L'essentiel, c'est que je les oriente et puis que je leur dise : « Ecoutez, ça, c'est illégal, il ne faut pas le faire », et puis voilà. Ensuite, qu'elle me mente, c'est son souci à elle. Le seul truc qui pourrait être embêtant, c'est si je faisais un certificat en disant : « je certifie que son mari la bat ». Si je faisais un certificat comme ça, qui serait tout à fait illégal, je serais dans l'erreur à faire une chose pareille, je ne le fais pas. Même pour celles que je crois à fond, c'est pas la question de croire ou pas, c'est pas la question. Dans la relation thérapeutique que j'ai avec elles, elles me disent des choses et puis voilà. Qu'elles aient envie de le dire pour une raison ou pour une autre, ça les regarde elles, elles me disent les choses, même si ce n'est pas vrai, elles ont eu envie de le dire à ce moment-là, pour une raison x ou y que je saurai pas et dont je me moque complètement, en plus. Et l'essentiel, c'est de les avoir écoutées, d'avoir écouté leurs paroles, parce que je sais que, même si ça ne m'est jamais arrivé, vraiment de douter, moi, à partir du moment où moi, je me protège en faisant des certificats comme il faut, sans risques pour qui que ce soit, et sans risques pour les enfants ou le mari, Vraiment des choses très neutres. L'essentiel, c'est qu'elles aient entendu, qu'elles soient écoutées. En fait, si elles font ça, c'est quand même qu'elles sont quand même assez insécures parce qu'elle sait que je saurai écouter. Après, que je la croie ou pas, je m'en fous, en fait, ça ne rentre pas en ligne de compte, p.311

Q. Tu, te rappelles d'une situation qui t'aurait particulièrement marquée, une situation où tu aurais dépisté des violences et est-ce que tu peux me la raconter et me dire un petit peu ce que tu avais ressenti à ce moment-là, et comment tu as géré les choses ?

F. Non and L. .. , Parce que, c'est rare que le type tabasse sa femme et qu'elle vienne ici. Finalement, j'en ai très peu qui viennent me voir pour un certificat de coups et blessures, ou alors c'est qu'ils ont déjà enclenché Ils ont déjà fait ça auparavant ou alors ils viennent me voir après, au moment du divorce. Mais, à chaque fois, c'est des choses qui sont extrêmement subtiles, en fait. Donc, c'est dur de dire la première fois, c'est toujours maltraitance à la femme

Q. Que, depuis le début de ta carrière, tu as remarqué que tu as progressé dans ce domaine-là? Est-ce qu'il y a des choses où tu te sens plus à l'aise ?

. .. Ce-que-j-'avais-bien-aimé, ils nous avaient expliqué, justement, tout ce qu'étaient les cycles de la violence, le fait que ça tournait en cycle Et j'avais trouvé ça vraiment intéressant. Ca permet de relativiser aussi les choses, de se dire : « A un moment donné, ça va finir par s'arrêter ». Et puis, ça permet de prendre un peu de recul par rapport à ça Le recul, c'est peut-être quelque chose que je n'avais pas au départ et que j'ai beaucoup plus maintenant. C'est ce qui est vraiment très important sinon, on ne s'en sort plus. C'est les gens que je croise. J'habite ici, donc en fait c'est des gens que je croise Je croise leurs enfants, je croise leurs maris, donc, du coup, c'est quelque chose qui est compliqué pour moi parce qu'en général je soigne toute la famille et il faut vraiment que je prenne du recul par rapport à ça. Et l'avantage, c'est que j'oublie vite, et du coup, je peux tout à fait les croiser sans y penser, absolument pas, pareil quand c'est le mari. Et ça, je dois dire que c'est bien. C'est une manière de se protéger un petit peu, de ne pas être envahie. Autant, au début, ça m'embêtait, parce que quand je croisais les gens dans la rue, me souvenir de leurs noms, me souvenir de ce qu'ils avaient, c'était impossible, alors que, eux, ils sont là Ils ne sont pas chiants, ils ne me prennent pas trop la tête, ils sont super sympas, mais ce que je veux dire, c'est qu'au départ, j'étais un petit peu embêtée parce que je n'arrivais pas trop à les replacer. Je me suis installée il y a trois ans. Maintenant, je les replace plus, parce que je connais toute la famille, mais même des fois, avec le Club des Remplaçants. Ca avait été vraiment bien cet oubli-là autrefois m'embêtait plus. Maintenant, je trouve que c'est plutôt sympa, parce que, du coup personne ne m'embête plus que ça

. Ben, Ca fait faire le grand écart entre les deux, c'est pour ça qu'il est vraiment important, du coup de ne pas du tout prendre parti, en fait Faut vraiment faire les choses le plus neutre possible Et puis, les gens le savent, quand je vois les deux, qui continuent à venir me voir alors que pourtant, j'ai fait des certificats pour l'un, des certificats pour l'autre, ça veut dire qu'ils voient que, voilà , c'est quelque chose de neutre. Ils me demandent un avis professionnel, je leur donne. Ca s'arrête là. C'est pas du tout une implication personnelle et je pense qu'à partir de ce moment-là, ça va.... Après, c'est sûr que ça peut poser problème. Et puis, si je vois que ça peut être un peu tendancieux, que vraiment je ne vais pas y arriver, il y a un moment donné, je leur dis, Il faudrait..... » Une fois, j'ai failli demander aux gens : « Ecoutez, il faudrait que l'un de vous trouve un autre médecin, parce que ça va ne plus être possible ». Puis, finalement, c'est rentré dans l'ordre. Non, finalement, ils se sont séparés, et du coup Mais c'est pour ça qu'il faut absolument ne pas prendre parti

S. De-demander and . Eux, Certains viennent parce qu'ils sont déprimés ou pour des raisons autres, et donc, je vais leur demander Je vais leur dire : « Mais est-ce que vous vous sentez, -même à des femmes violentes -, est-ce que vous vous sentez agressive avec vos enfants ? Est-ce que vous vous sentez agressive avec votre Annexes --313 -mari ? Est-ce que des fois le geste dépasse la pensée ? » Alors là, on est plus du coté du physique que moral, j'aurais plus de mal à lui dire : « Est-ce que vous humiliez votre femme ? » C'est un truc qui sera plus difficile à demander pour dépister, Par contre : « Est-ce que vous les tapez ? Est-ce vous vous sentez agressif ? », ça

M. Moi and . Biais-je-la-dépiste, Je cherche, parce que je sais à quel point c'est bien de la trouver. Parce qu'une fois qu'on l'a trouvée, le simple fait que les gens parlent, ça résout le problème. Même s'ils sont aux trente-sixièmes dessous, la semaine d'après, ils vont aller super bien. Du coup, c'est vraiment une chose importante, et je la cherche vraiment, parce que

. Ah, Moi, comme je cherche ça spécifiquement, après, je vais chercher ce qu'il y a en fait dans le cadre familial. Je vais chercher un peu tout. Pas que les hommes, c'est aussi la famille, les grands-parents

. Moi, je fais cette recherche-là, et cette recherche prend du temps. Le temps n'est pas un problème, c'est qu'en fait

Ç. Après and . Du-type-de-maltraitance, est absolument pas présent, en général je les fais beaucoup parler, souvent ça permet de lever un peu la tête hors de l'eau, donc de voir les choses différemment. Après, je les oriente vers des psychologues, éventuellement au CHU, où elles vont beaucoup parler, parler de ça, et à force de parler, elles vont impliquer leurs maris différemment. Plutôt que d'attendre que ça arrive, en quelque sorte, elles vont leur imposer les changements, les choses comme ça. Donc, c'est sûr que le temps que j'ai, le temps que je leur donne à écouter, c'est quelque chose que je pense qu'elles n'auront pas forcément. Après, je ne sais pas. C'est sûr que si un homme, il a vécu une dépression du post-partum, ou si sa femme a fait une dépression post-partum, il va peut-être être aussi plus attentif. De toute façon, on cherche toujours plus, ce qu'il y a après, par rapport à la violence, Là, c'est le côté violences subtiles, hein. Ca pourrait n'être pas de la violence, ça pourrait être la façon normale de vivre en couple, finalement. Si on va par là, autrefois, c'est comme ça qu'ils faisaient. Donc, du coup, c'est plus des petites violences subtiles

A. James, M. G. Gunnar, and O. Genève, Pour ça, il faut avoir du temps. Après, il faut chercher Tous ne cherchent pas, mais je ne pense pas que ce soit une question d'homme ou de femme. Moi, mon côté femme, c'est plus ce côté-là, péri-partum, tout ça, c'est plus ça qui va me.... mon expérience personnelle qui m'oriente là-dessus. Après, par rapport à la violence, je pense que n'importe qui est capable d'entendre ça. J'en parlais un jour avec un kiné, dans le village à côté, et il me disait qu'il massait une bonne femme, et celle-ci lui disait que son mec l'obligeait à faire des partouzes, alors qu'elle ne voulait pas. « Je suis en train de la masser et elle me raconte ça ». C'est juste une question d'écoute, à mon avis. Si on n'a pas le temps et que ça roule, personne ne parle. Quand j'ai des internes ou des externes, souvent ça va comment évaluer a priori un programme de dépistage ?, pp.68-181, 1970.

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