M. Roland, En couverture : Johann Heinrich Lips (graveur), De Bréa et Michel Hennin (dessinateurs), vol.1793

, c'est vous qui livrez à l'oppression ses membres les plus distingués par leurs vertus et leurs talents ; c'est vous qui les verriez avec une égale lâcheté conduire à l'échafaud par une procédure semblable à celle qui y fit périr Sidney ; c'est vous qui répondrez de tant de forfaits à la France indignée ; c'est vous qui servez les ennemis ; c'est vous qui préparez le fédéralisme, Nous restituons ici le passage : « [?] c'est vous qui l'enchaînez, pp.50-51

. Ibid,

, Il fut question de me donner une médecine : on m'apporte le triste breuvage, je l'approche de mes lèvres, son odeur me le fait repousser avec dégoût ; [?] à chaque fois que l'horrible déboire m'était apporté sous le nez, mes sens révoltés me faisaient détourner la tête

. Le, Faisant appel aux sensations olfactives et gustatives, M me Roland rend son écriture très animée et énergique. Cette utilisation des sens permet de rendre compte d'un corps faible et souffrant qui ne peut supporter le moindre remède, exprimant alors de vives répulsions à chaque atteinte qui lui est faite. M me Roland fait également appel aux sensations tactiles, écrivant dans ses Mémoires qu'un « frisson terrible se promenait à la surface de [s]on corps 2

, Agnès Walch écrit : Il arrive que les enfants soient confrontés à des expériences dont ils ne sortent pas indemnes sous le toit familial. Les agressions sexuelles sont des sources d'angoisse violente, d'autant que l'éducation à la pudeur enserre les filles dans un carcan moral aliénant 3

, Durant son enfance, M me Roland est agressée sexuellement par l'un des apprentis de son père

, Elle nous emmène alors, avec ses Mémoires, dans une intimité qui, ayant véritablement heurté sa pudeur et sa sensibilité, nous présente un corps affaibli face aux nombreuses insistances de son agresseur : Il prend ma main, comme en jouant, et, la tirant sous l'établi près duquel il était, il me fait toucher quelque chose de fort extraordinaire

A. Walch and . De, âme sensible à l'avènement scientifique des émotions : la densification des émotions dans la sphère privée » dans Histoire des Émotions. Des Lumières à la fin du XIX e siècle, op.cit., p. 222. met à ma vue l'objet de mes frayeurs. Je tourne la tête. « En vérité, monsieur, cela est horrible !

M. Âgée-seulement-d'une-dizaine-d'années and . Ne, Face à cette intimité, face au corps de cet homme qui lui provoque de vives répulsions, la jeune fille tente de s'enfuir. Empêché dans ses actions, son corps est contraint de subir celui de son agresseur sans véritablement pouvoir s'en défaire. Manon qu'il juge puérile et sans véritable fondement. Il renouvelle alors son agression, quelques jours après : Il se tient derrière moi et, lorsque je suis pour descendre, plaçant ses mains sous mes bras, il m'enlève, en me pressant sur lui de manière que mes jupes se relevaient et que je me trouvai presque à l'instant assise sur ses genoux, car il s'asseyait en même temps sur un siège, et je sentis derrière moi cette chose extraordinaire? [?] Il porte une main hardie là où n'atteignait point autre chose et cherche à la rendre caressante. Je voulais me débattre, et m'efforçant de repousser ses bras, de changer de situation

, Marquée par cette « honte de l'impudeur qui aiguise à l'extrême le sentiment d'avilissement de la fille 5 », Manon emploie toute ses forces afin de pouvoir s'échapper de l'emprise de l'apprenti, se débattant avec un grand courage. Si elle réussit à s'enfuir lors de ces deux attaques, son corps s'en retrouve toutefois très affaibli puisqu'elle sent véritablement ses jambes trembler sous elle

, Dans un état d'extrême fragilité, à la fois pâle et troublée, Manon se réfugie auprès de sa mère

, Depuis sa prison, la mémorialiste garde cette même pudeur qui la caractérisait durant ses jeunes années, ne cessant de qualifier le sexe de l'apprenti de « chose extraordinaire

, Si la mémorialiste invite son lecteur à entrer dans l'intimité de cette agression sexuelle

. M-me-roland and . Mémoires, , p.331

L. ,

S. Jahan, L. Corps, and . Lumières, Émancipation de l'individu ou nouvelles servitudes ?, p.32, 2006.

. M-me-roland and . Mémoires, , p.334

S. Jahan, L. Corps, and . Lumières, Suite à ces tentatives de viol et à cette exaltation des sens due à la puberté, Manon décide de s'éloigner de tout ce qui relève du corps humain et de la sexualité : Je contractai l'habitude d'une telle réserve que, en lisant à seize ans l'Histoire naturelle de Buffon, et n'étant plus dévote, je sautais sans le lire ce qui traitait de la génération de l'homme, et je glissais sur les planches relatives avec la promptitude et le tremblement de quelqu'un apercevant un précipice. Enfin, je ne me suis mariée qu'à vingt-cinq ans, et avec une âme telle qu'on peut la présumer, des sens très inflammables, beaucoup d'instruction sur divers objets, j'avais si bien évité l'augmentation de celle dont les commencements furent si prématurés, p.32

, Éprouvant alors un profond dégoût pour l'érotisation des corps, Manon, très chaste et pudique, ne se doute pas de ce qui l'attend lors de sa nuit de noces. Le corps, traumatisé lors de la puberté et des tentatives de viol, l'est également lors de cette nuit qui lui procure plus de souffrance que de plaisir

. Le-leitmotiv-des-larmes-«-non, elles sont plus souvent l'apanage de cette même sensibilité dont l'énergie développe les plus grandes vertus 2 ». Selon M me Roland, si les larmes engendrent la faiblesse du corps, elles sont également un facteur de sensibilité permettant à tout individu d'exprimer avec courage le plus profond de son âme. L'émotion s'extériorise, devenant alors une « réaction corporelle 3 ». Motif récurrent dans les Mémoires de M me Roland, les larmes sont vécues par le Je narrant, lors du moment de l'écriture, mais également par le Je narré, par la M me Roland du passé. Depuis sa prison, attelée à la rédaction de l'oeuvre de sa vie, la mémorialiste vit ce retour dans ses souvenirs comme un acte profondément douloureux : Environnée de ces tristes images, je n'ai pu me soustraire à la douleur ; des larmes rares s'échappent de mes yeux appesantis

R. M-me, , pp.1780-1793

A. Walch, « De l'âme sensible à l'avènement scientifique des émotions : la densification des émotions dans la sphère privée, Histoire des Émotions. Des Lumières à la fin du XIX e siècle, p.204

. M-me-roland and . Mémoires, Anne-Vincent Buffault souligne l'usage hyperbolique qui est effectué dans les récits du XVIII e siècle : C'est tout d'abord l'excès de l'épanchement qui est donné à lire. Le paroxysme de l'émotion s'exprime par l'usage de l'hyperbole : on verse des torrents ou des ruisseaux de larmes, son Histoire des larmes, p.363

, Ainsi, assistant à la cérémonie effectuée pour l'entrée en religion d'une novice, elle écrit : C'était pour moi l'image de la rupture absolue des liens du monde, du renoncement à tout ce qu'elle avait de cher

, je crus qu'on m'arrachait à ma mère, et je versai des torrents de larmes 4

, La peur d'être coupée du monde, associée à celle de perdre sa mère, se manifeste extérieurement par d'abondantes larmes, donnant ainsi un aspect charnel à sa sensibilité. M me Roland, dans la veine de ces écrits du XVIII e siècle, utilise l'hyperbole qui, à l'instar de l'hypotypose fréquemment utilisée dans ses Mémoires, donne à la fois de l'entrain et de l'ampleur à son récit. La première communion de M me Roland est un événement qui, nous le voyons, met son corps et sa sensibilité à rude épreuve : Cette considération me pénétrait entièrement ; elle avait tellement enflammé mon imagination, attendri mon coeur, que, baignée de larmes et ravie d'amour céleste, il me fut impossible de marcher à l'autel sans le secours d'une religieuse qui vint me soutenir par-dessous les bras et m'aider à avancer à la sainte-table 5 . dévotion pour l'humanité. N'éprouvant aucune peur face à la maladie, Versant une nouvelle fois des « torrents de larmes », M me Roland donne à l'émotion ressentie un aspect physique et corporel

, Triomphant de la douleur par une aptitude à se contrôler avec sang-froid, elle fait preuve d'une grande détermination : J'ai expérimenté, toutes les fois que j'ai été malade, une sorte de calme tout particulier, et qui tient sans doute à ma façon de voir, ainsi qu'à la loi que je me suis faite d'adoucir toujours la nécessité

, Plus d'efforts, plus de calculs, plus de raison ; toute à la nature et, paisible comme elle, je souffre sans impatience ou me repose et m'égaye 1

M. Pour and . Roland, Très adepte des Vies parallèles de Plutarque, il ne fait aucun doute qu'elle s'inspire de l'un de ses héros, Caton le Jeune, dont elle admire les nombreuses vertus et qui, face à la maladie, faisait preuve d'une force exemplaire. Il était en effet, d'après Plutarque, « d'une endurance et d'une maîtrise de soi admirables 4 ». Lorsqu'il avait de la fièvre, il passait ses journées seul « sans recevoir personne jusqu'à ce qu'il sentît une amélioration et un changement certain de son état 5 ». Dès lors, M me Roland s'identifie à ce modèle de force et de bravoure, à cet héroïsme qui se développe dans la plus stricte intimité. Si Caton lui a permis de façonner son image du grand homme, l'homme doit faire preuve de raison afin de supporter une douleur qui n'est en réalité que passagère

, Selon la mémorialiste, la prison produit sur elle « à peu près le même effet que la maladie 6 », lui permettant d'expérimenter une nouvelle fois le calme et la sérénité face à la douleur qui lui est infligée. M me Roland accepte alors sa condition de prisonnière avec une force imperturbable

. Ibid,

. Plutarque, Vies Parallèles II, p.222

. Ibid,

. M-me-roland and . Mémoires, Mon courage n'était point au-dessous de la nouvelle disgrâce que je venais d'essuyer [?] Jamais les états violents ne sont pour moi de longue durée ; j'ai besoin de me posséder parce que j'ai l'habitude de me régir 1, p.73

, M me Roland fait preuve d'une grande maîtrise de soi et ne songe plus qu'à conserver cette fermeté et cette force de caractère au milieu des fers. Impassible face au malheur et à la douleur, elle s'érige alors en héroïne. Pour elle, la fermeté « ne consiste pas seulement à s'élever au-dessus des circonstances par l'effort de la volonté, mais à s'y maintenir par un régime et des soins convenables 2 ». Par conséquent, elle s'emploie, depuis sa prison

». , Par ces diverses privations, M me Roland veut prouver qu'elle possède la force de résister à toutes les souffrances possibles, aussi bien celles infligées par ses ennemis que celles qu'elle s'inflige elle-même. Ferme dans ses principes, elle ne recule alors devant rien. Indépendante et déterminée, elle n'a besoin de personne et est résolue à ne compter que sur sa propre force. Sa lettre à Robespierre, écrite le 14 octobre 1793, en est un parfait exemple : Je ne vous écris pas pour vous prier, vous l'imaginez bien : je n'ai jamais prié personne

, Si l'écriture de cette lettre lui permet d'insister sur cette grande force qui la caractérise, celle de ses Mémoires lui permet d'affronter avec sérénité la douleur que peut lui procurer sa condition

, Se plonger dans son enfance lui permet d'échapper momentanément à la prison, d'éprouver un semblant de bonheur : « En vérité, je suis presque heureuse d'être en prison pour me rappeler

. Ibid,

. Ibid,

M. Roland and C. Politique, , p.171

. M-me-roland and . Mémoires, , p.386

, Lorsque la mémorialiste apprend la perte de certains de ses manuscrits 2 , c'est avec une grande fermeté qu'elle réagit, bien résolue à lutter contre toutes les douleurs qui lui sont infligées : Je m'indignerais contre moi-même de me laisser abattre par quoi que ce soit. Dans toutes les peines que j'ai essuyées, la plus vive impression de douleur est presque aussitôt accompagnée de l'ambition d'opposer mes forces au mal dont je suis l'objet, et de le surmonter 3 . sur elle : Mes larmes s'arrêtent tout à coup, mes sanglots s'apaisent, un calme subit réunit mes facultés dans une seule résolution : je me lève sur mon lit, je me tourne du côté de la ruelle, j'incline ma tête en l'appuyant sur le mur, je trousse ma chemise, temps paisibles de saintes illusions 1, p.363

, Face à cette scène, le lecteur ne peut que songer à celle de l'échafaud. Prête à mourir, M me Roland fait preuve de ce même courage, s'inclinant « devant la statue de la liberté 5 » et prononçant ces paroles désormais célèbres : « Ô liberté ! Que de crimes on commet en ton nom ! » Songeant, depuis sa cellule, à la force dont elle fera preuve le jour de sa mort, et la mettant en lien avec celle éprouvée face aux coups de son père, elle écrit : « Je n'aurais pas plus à faire aujourd'hui pour monter fièrement à l'échafaud, que je n'en fis alors pour m'abandonner à un traitement barbare, qui pouvait me tuer et non pas me vaincre 6 ». La mémorialiste désire montrer à son lecteur que, malgré sa mort, ses adversaires ne réussiront pas à anéantir les idéaux pour lesquels elle se bat. Honoré Riouffe, prisonnier qui rencontre M me Roland à la Conciergerie, souligne dans ses Mémoires cette grande force qui la caractérisait : « Après sa condamnation, elle repassa dans le guichet avec une vitesse qui tenait de la joie, Dotée d'un grand courage, la jeune fille affronte les souffrances infligées par son père avec une dignité, une fermeté et une force exemplaires

, Craignant pour sa vie ainsi que pour la sécurité des manuscrits, Champagneux se voit contraint de les brûler

H. Riouffe, Mémoires d'un détenu pour servir à l'histoire de la tyrannie de Robespierre, p.44

. M-me-roland and . Mémoires, , p.319

H. Riouffe, Mémoires d'un détenu pour servir à l'histoire de la tyrannie de Robespierre, op.cit., p. 44. début jusqu'à la fin de sa vie, M me Roland fait preuve de cette incroyable force qui lui permet de résister aussi bien aux douleurs du quotidien qu'à

, Se vouant corps et âme à la politique, elle fait preuve d'une « énergie de l'âme volontaire 2 » qui s'exprime 'effectuer. Affirmant qu'elle ne craint rien au monde et qu'elle veut exprimer avec force des vérités utiles pour la République, M me Roland révèle, dans ses Mémoires, l'énergie qu'elle n'a cessé de déployer : J'étais effectivement dans cette disposition d'âme qui rend éloquent ; pénétrée d'indignation, au-dessus de toute crainte, enflammée pour mon pays dont je voyais la ruine, tout ce que j'aime au monde exposé aux derniers dangers, sentant fortement, m'exprimant avec facilité, trop fière pour ne pas le faire avec noblesse, j'avais les plus grands intérêts à traiter

, Face aux maux endurés à la fois par son pays et son mari, M me Roland ne peut rester de marbre

, Puisque ceux à qui elle s'adresse en sont dépourvus, elle n'a d'autre choix que d'employer toutes ses forces afin d'essayer de sauver sa patrie, agissant alors avec passion mais surtout avec raison. Poussée par de profondes impulsions, M me Roland n'en demeure pas moins maîtresse d'elle-même, révélant ainsi de remarquables talents d'oratrice. Comparant, dans ses Mémoires, son énergie à celle de son mari, Dès lors, elle n'hésite pas à exprimer sa fureur avec une énergie incomparable

, Michel Delon souligne que l'énergie appelle souvent les femmes « à quitter la place que

, Rousseau et ses successeurs leur assignaient au foyer 3 ». Puisque la vie domestique ennuie M me

E. Roland, émanciper de son maître à penser, gagnant Paris afin de réveiller cette énergie qui sommeille en elle et qui ne demande qu'à accomplir de grandes choses. L'élévation de son mari au sein de la sphère politique lui procure alors cette force de caractère dont elle ne soupçonnait pas l'existence : « Ce n'est aussi que de cette époque que j

, Grâce à son mari qui lui procure un statut politique, elle peut enfin exprimer une énergie qui lui est nécessaire pour vivre. Dans ses Souvenirs, Sophie Grandchamp révèle que la santé de son amie « dépérissait chaque jour 5 ». Avant que son mari n'entre en politique, M me Roland éprouvait le sentiment d'un véritable vide. Sa vie lui apparaissant dénuée de sens, elle était dévorée par certaines « peines secrètes 6 » qui lui « faisaient souhaiter de terminer son existence 7 ». La politique devient alors l'unique remède afin de lui procurer de l'énergie : J'avais cru remarquer que M me Roland nourrissait en secret une ambition qui contribuait à l'état de langueur qui la consommait chaque jour ; l'élévation des gens qui ne valaient pas son mari, la nullité à laquelle elle se trouvait réduite, On sentait bien que je valais quelque chose 4

. M-me-roland-n'éprouve-alors and . Qu, un seul désir : celui de s'élever socialement et d'être au centre de la sphère politique afin de pouvoir exercer sa force et son énergie dans la réalisation de justes

M. Delon, Idée d'énergie au tournant des Lumières (1770-1820), op.cit, p.268

. M-me-roland and . Mémoires, , p.244

S. Grandchamp, « Souvenirs » dans Mémoires de M me Roland contenant des fragments inédits et les lettres de la prison, p.473

. Ibid,

. Ibid,

, Sophie Grandchamp assiste alors à l'extraordinaire métamorphose de son amie qui, venant d'apprendre la nomination de son mari, retrouve une vitalité qu'elle avait perdue : Je crus rêver en entrant dans le salon. Mon amie, mourante le matin, avait recouvré sa fraîcheur et ses grâces, p.475

M. , R. Qui, and L. Matin, ne pouvait « à peine se soutenir par son extrême faiblesse 2 », déploie désormais une énergie entièrement due à son entrée en politique. Enflammée par la Révolution et les affaires d'État, elle est prête à s'élever au-dessus de toutes les épreuves afin de faire de la France un pays à la fois libre et vertueux. Dominée par cette énergie, M me Roland la dédie à sa patrie jusqu'au jour de sa mort

C. Michel-delon-nous-explique-que,-lorsque, O. Corday, . De-gouges-ou-m-me-roland, and . Qu, Utilisant nombre d'interjections, d'exclamations et de répétitions, maniant avec soin l'hyperbole et l'hypotypose, interpellant ses ennemis politiques, M me Roland sait procurer à ses lecteurs l'incroyable sensation de vivre les événements au même instant qu'elle. Citons cette phrase, parmi tant d'autres, qui s'avère parfaitement représentative de l'énergie qu'elle ne cesse de donner à son écriture : « Ainsi, le malheur peut me poursuivre et non m'accabler ; les tyrans peuvent me persécuter, mais m'avilir ? jamais ! jamais ! 5 » Son écriture reflète alors, tel un miroir, la force et l'énergie de son âme qui ne craint rien ni personne. solution afin de voler la victoire à ses adversaires et de les empêcher de faire d'elle, à tort, un symbole de culpabilité et de trahison contre l'unité de la République. M me Roland ne veut pas laisser à un pouvoir arbitraire le soin de décider de ses derniers instants et de contrôler l'image qui sera renvoyée d'elle à la postérité. Prête à se sacrifier pour le bien public, elle veut laisser d'elle l'image d'une femme forte et courageuse. Au XVIII e siècle, le suicide par arme à feu est considéré comme foncièrement masculin. En effet, les femmes « ignorent quasiment ce moyen qui reste associé à la violence guerrière masculine 1 » et se tournent plutôt vers la défenestration et la noyade, moyens privilégiés pour se suicider lorsqu'on est une femme. Dans son ouvrage, Dominique Godineau souligne toutefois le pic des années 1790-1816 durant lesquelles certaines femmes se tournent vers le pistolet

, Évoluant dans un monde masculin, elle en a appris les codes et désire désormais le quitter de la même manière qu'un homme le ferait, par l'utilisation d'une arme qui révèle son tempérament

, jusqu'à ce que César arrive et me trouve hors d'état de me défendre 5 ? » Puisque Caton ne pouvait supporter l'idée d'être tué par son ennemi, il se suicida avec son épée et prononça ces dernières paroles : « Maintenant je m'appartiens 6 » qui auraient pu, sans aucun doute, être prononcées par M me Roland. En effet, éprise de liberté, elle n'a cessé d'être la propre maîtresse de sa destinée. Si le modèle de la mort volontaire à la romaine est présenté comme masculin, Caton prononça ces paroles empreintes d'ironie : « Pourquoi donc, généreux fils, n'enchaînestu pas ton père et ne lui attaches-tu pas les mains derrière le dos

D. Godineau, Abréger les jours. Le suicide en France au XVIII e siècle, op.cit, vol.2, p.106

F. Frazier, Histoire et morale dans les Vies parallèles de Plutarque, op.cit, p.228

. Ibid,

. Plutarque, Vies Parallèles II, p.262

. Ibid, Elle se résigna enfin à vivre jusqu'au procès des Girondins, dans l'espoir de pouvoir témoigner. Son rêve était de s'empoisonner en plein tribunal, avec une déposition énergique. Sollicité, Bosc refusa de lui faire parvenir le poison 1 . le bien-être de ses semblables avant le sien. Forte, énergique et courageuse, mue par le profond désir de devenir une héroïne

, Grâce aux Mémoires et aux Lettres, cette étude a pu mettre en valeur différentes facettes de M me Roland qui, s'il est abordé et traité ici

, Si M me Roland revendiquait son refus de devenir écrivaine, les écrits qu'elle laisse prouvent à bien des égards qu'elle en possédait les capacités, devenant ainsi, aux yeux de la postérité

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.. .. I--une, 12 1 -De l'enfant à la femme : la liberté de construire son destin

R. Les-lectures-de-m-me,

.. .. La-liberté-de-croire-ou-de-ne-pas-croire,

, 26 2.1 -Être écrivaine au XVIII e siècle : la vision ambivalente de M me Roland, La question du mariage : liberté de choix et relation d'égal à égal

.. .. Le-refus-de-devenir-Écrivaine,

L. and .. .. , 31 2.2 -Place de la femme : de l'imitation d'un modèle à l'affirmation personnelle

.. .. Se,

.. .. Être-une-femme-publique,

. .. La-transparence-de-son-influence, 49 3.1 -Huis clos et amitiés féminines : de l'attachement à l'éloignement

. .. Les,

L. and .. .. ,

, 2 -La vision dépréciative de la femme mondaine

.. .. De,

?. and .. .. , 63 3.3 -La fréquentation d'une société masculine : un choix stratégique ?

. S'éloigner, des femmes : une manière de légitimer sa place

. .. Ii--la-construction-d'une-pensée-politique, 74 1 -Entre condamnation et modération : la vision de M me Roland

.. .. La-condamnation-de-la-monarchie,

.. .. -la-mise-en-place-d'une-tolérance-politique,

U. and .. .. ,

, La dénonciation des massacres : soutien et modération

, 2 -Attitudes et comportements : vers une réflexion sur le grand homme ?

.. .. La-transformation-d'un-genre,

, Une tonalité impérieuse pour dénoncer la faiblesse des Girondins

. -entre-l'éloge and . Le-blâme, 103 L'exemple de l'anecdote : une entrée dans l'intimité de l'homme, la construction d'un idéal politique

. L'éloge, Condamner pour réformer : la mise en place du blâme

.. .. 3--une-lutte-contre-l'obscurantisme, 122 3.1 -Le peuple : entre ignorance, servitude et corruption

.. .. Le-constat-d'une-ignorance,

U. and .. .. ,

U. Réquisitoire-contre-le-peuple and .. .. ,

, 2 -La presse comme outil de diffusion

. La-presse-révolutionnaire and .. .. Du-patriote-français,

.. .. Les-lettres-de-m-me-roland-publiées-dans-le-patriote-français,

. .. Iii--représentation, 140 1 -Entre un moi personnel et un moi au service des autres

. .. Le-pacte-autobiographique,

L. and .. .. ,

L. Mise-en-place-de-retranchements and .. .. ,

.. .. -la-contestation-d'une-identité-:-le-désir-d'être-une-héroïne, 146 1.3 -La représentation du moi : un regard tourné vers l'autre

.. .. Entre,

.. .. La-représentation-d'un-caractère-philanthropique,

.. .. Entre-faiblesse-du-corps, 154 2.1 -La représentation d'un corps affaibli

. .. Le-corps-malade,

, Le corps victime des transgressions sexuelles

.. .. Le,

-. Roland, une force de la nature

L. and .. .. ,

.. .. La-politique,

. .. Décider-de-sa-mort,

.. .. Maîtriser-le-témoignage-d'autrui,

. .. Conclusion,

. .. Bibliographie,

:. Annexe and . Roland,