, Comment se sont passés les jours/semaines qui ont suivi votre sortie ? Ce retour à la vie dehors vous a-t-il paru facile ou difficile ? Pouvez-vous m'en parler ?

, Avez-vous été accompagné après votre sortie ? Par qui ? Etait-ce, selon vous, suffisant ?

, Comment vous êtes-vous réhabitué aux habitudes, aux contraintes quotidiennes (entretenir un logement, réaliser les démarches?) Est-ce qu'aujourd'hui, vous gardez encore des habitudes prises en détention ? Si oui, lesquelles ? Si non, avez-vous mis du temps à les perdre ?

, À quoi occupez-vous vos temps libres ?

, Avez-vous eu l'impression d'avoir pu vous réinsérer ? Que votre peine est derrière vous ? -Etes-vous toujours accompagné ? Quel(s) liens entretenez-vous avec les personnes qui vous accompagnent ? -Quelles sont les principales difficultés que vous rencontrez aujourd'hui ? (Démarches, adaptation

, Auriez-vous souhaité être plus accompagné après votre sortie ? Si oui, de quelle manière ?

, Quelle est votre situation actuelle ? (Familiale, professionnelle, sociale + logement) Votre situation actuelle correspond-elle à ces projets ? ? Satisfaction/désillusion

, Si non abordé : Pouvez-vous me parler de votre vie avant la détention ? (travail, famille, groupe d'appartenance, parcours scolaire, milieu social). Avez-vous gardé des liens avec cette « ancienne vie

, Diriez-vous que la prison vous poursuit en quelque sorte ? Si oui, de quelle manière -Sentiment d'être (trop ?) accompagné ? -Difficultés d'adaptation ? ? Exemples -Ressentis de méfiance, de jugement ou de suspicion de la part de la société ?

, Pouvez-vous nous dire où en sont vos projets actuellement ? Comment voyez-vous votre avenir ?

, Diriez-vous aujourd'hui que votre sortie a été positive ?

. Qu, est-ce qui serait, selon vous, le plus important à modifier dans l'accompagnement à la sortie des détenus de longue peine, Annexe VIII : Exemple de transcription -Entretien 5

. Cet-entretien and . Gros, Moi, j'ai choisi de le faire par ordre chronologique, parce que je pense que c'est plus simple pour tout le monde. Il s'agit de votre situation, en gros, avant la détention, pendant la détention, et la sortie, l'accompagnement à la sortie. S'il y a des questions qui vous gênent

, Il y a peu de chance madame, je suis quelqu'un de très facile pour ça

. Donc, commence ? Allons-y, je suis à vous

E. Alors and . Que, vous pouvez me parler un petit peu de vous et de votre situation avant l'incarcération ? Ce que j'ai oublié de vous préciser, c'est que les raisons qui vous ont amené en prison? On s'en fiche

. Voilà,

, Juste un petit aparté comme ça, c'est vraiment gravissime

V. Vous-ne-prenez-pas-une-très-grande-peine-comme-Ça, Alors, avant? Il faut savoir que je fais de la prison depuis mai 1982. J'ai fait quatre peines en réalité, ce qui fait qu'au total, bah, je me répète, mais je totalise 32 ans de taule au total. Voilà. Donc, j'ai passé ma vie en prison, en réalité. Voilà, donc, j'ai fait une première peine de 4 ans et 4 mois, j'en ai fait une seconde de 3 ans et 7 mois, j'en ai fait une troisième de 12 mois et 15 jours

, La première incarcération, vous aviez quel âge ?

, J'avais 21 ans et demi

, Vous étiez tout jeune?

. Ouais, . Ouais, and F. De-la, Sur cette peine-là, j'ai pris 5 ans à cette époque-là, et j'ai fait 4 ans et 4 mois, voilà. Alors, avant la prison, bon, ben, je suis jeune homme, je travaille, je suis chez moi

, Vous êtes allés à l'école ? Oui. | XII Jusqu'où êtes-vous allé à l'école ?

. Je, ai abandonné en cours de route, parce que je n'étais pas bien, à l'époque, je craquais complètement. Un beau jour, j'ai bazardé toutes mes affaires par-dessus la fenêtre du dortoir, j'ai tout foutu dans la rue, et je suis parti ; c'était un mercredi matin, et j'ai abandonné l'école comme ça, voilà. Je n'en pouvais plus, ça ne m'intéressait pas du tout, ce que je faisais? Et puis, je n'étais déjà pas bien dans ma tête

, Et par rapport à votre réseau familial, amical, vous étiez quelqu'un d'entouré, ou plutôt quelqu'un d'isolé ?

I. Enfin, Le milieu dans lequel j'ai vécu était un milieu ultra-violent, et physiquement, et verbalement. Le mode de communication, chez moi, c'était l'agressivité, la violence, les insultes, et la violence physique. Donc, en fait, j'ai gardé ça pour moi, je n'ai pas pu en parler ; d'où, d'ailleurs, le crime que j'ai commis, en fait, parce que j'ai explosé complètement, ça a pété. J'étais seul, en vérité, pour répondre à votre question, j'étais entouré de ma famille, certes, mais personne ne se rendait compte de ce qui se passait chez moi. J'ai été un enfant battu, et un adolescent battu aussi, voilà. Donc, voilà. Donc, j'ai eu une enfance et une adolescence épouvantables. Oh ! Je ne veux pas passer pour un martyr ou je ne sais trop quoi, mais j'étais un enfant battu et un adolescent battu, mon père a failli me tuer, d'ailleurs, à coup de fusil. Voilà, aujourd'hui, je porte encore des traces Là, que je vivais chez mes parents, mais j'étais seul quand même, parce que je n'avais aucun interlocuteur

. Ça, Et moi, je passe mon temps, mon temps dans la nature, à étudier les insectes. En fait, si, je suis seul. Ce que je vis dans ma famille, je ne peux pas en parler, je n'ai pas d'interlocuteur, je garde tout pour moi, et je vis dans un état, mais alors, d'anxiété et de stress épouvantable. Epouvantable. Epouvantable. Je suis un gosse, un jeune adulte, extraordinairement mal dans ma peau

. Oui, alors relativement peu de temps, puisque l'incarcération est survenue relativement rapidement. J'ai dû travailler 6 mois chez lui. Dans le même moment, enfin, juste avant d'être arrêté, le seul interlocuteur

C. A. , Je crois qu'il n'y a pas une journée où je ne pense pas à lui. Voilà, s'il avait été là, je n'aurais pas craqué comme j'ai craqué, il aurait été à côté de moi, et je n'aurais pas déconné, je n'aurais pas commis un crime comme je l'ai fait. S'il avait été là, ouais. Et le fait qu'il décède dans ces conditions-là, ça m'a encore plus enfoncé, j'ai totalement craqué, vraiment, craqué totalement, j'étais plus moi-même. Ça, c'est mon adolescence et jeune adulte, quoi. Vraiment, c'était vraiment horrible, quoi. À l'époque, je ne jouais plus au footj'ai joué 10 ans au football -et je me désistais régulièrement, je trouvais des prétextes, enfin « J'ai mal au genou, j'ai mal cela, j'ai mal ceci, je ne peux pas jouer, C'était quelqu'un qui avait juste quelques années de plus que moi et qui, malheureusement Alors, moi, je suis tombé le 24 mai 1982, et début mai 82

C. and ?. , Quand j'apprends ça, je suis tombé par terre, les jambes ne me portaient plus, je suis tombé par terre, en larmes? Enfin bref, voilà, tout ça, c'est dans le même moment. Et voilà, c'est ce qui fait que j'ai dérapé complètement, quoi. Voilà, toutes ces choses-là ont fait que

. Alors, un premier mariage, mes parents ont divorcé, mon père s'est remarié et j'ai un demi-frère, un demi-frère qui est plus jeune

, 34 ans, c'est ça, quand je suis parti, il avait 10 ans, 24 ans, il a 34 ans

, De ce frère ou de tout le monde ?

H. .. Mon-père, Je vais employer un mot détestable, je suis désolé, mais je le pense réellement, mon père, c'est une saloperie, je ne l'aime pas, je ne l'aime pas. Je ne l'aime pas, il m'a défoncé la gueule toute mon enfance, c'est un facho ; quand je vous dis que c'est un facho, c'est vraiment un facho. Il est raciste, il est homophobe

, Et votre soeur ? Et votre maman ?

. Merci and . Alors, je ne m'entendais pas plus que ça avec maman, mais bon, ça reste ma maman quand même. Ma mère m'a battu aussi

E. Mais-ma-maman, Et ma maman est partie il y a 2 ans et demi dans des conditions abominables ; elle est décédée? Elle avait une maladie dégénérative, elle perdait la matière cervicale, le lobe frontal, ce qui | XIV fait qu'elle avait les symptômes de la maladie d'Alzheimer, en fait, elle ne reconnaissait plus personne, elle faisait n'importe quoi. Et quand nous sommes allés la voir, la rencontrer, elle ne m'a même pas reconnu. Elle ne m'a pas reconnu. Elle était cloîtrée dans une institution, elle était violente, et c'est terrible de voir ça, ça m'a fait beaucoup de mal. J'étais très heureux de la revoir, parce que cela faisait -que je ne vous dise pas de bêtises -17 ou 18 ans que je ne l'avais pas revue, et ça m'a fait un choc terrible. Et ma soeur

, Donc, c'était l'occasion de revoir votre soeur aussi, à ce moment-là ?

. Non, B. De-voir-c.-et, and C. Enfin, je l'avais vue une fois au parloir, en maison d'arrêt, en 95 je crois, ou 96. D., ma copine du moment, me l'avais apportée, elle était tout bébé? Donc, je l'avais vue une fois, mais elle était vraiment tout bébé, elle avait 1 ans peutêtre, voilà. Je ne les connaissais pas quoi, et le jour où nous sommes allés voir maman, B. et C., mes neveu et nièce avaient donc séché les cours juste pour mon passage à [?], quoi. Ils sont magnifiques, ils sont magnifiques, et très intelligents aussi. C. est infirmière aujourd'hui, elle a son diplôme, et B. fait de très hautes études. Ah ! Oui, il va devenir ingénieur, lui, ah oui, c'est vraiment une grosse tête. Il est extraordinaire B., c'est un surdoué, il est vraiment incroyable. Ce sont de très beaux enfants

V. Grâce-À,

C. , Moi, je suis attaché à ma terre, je suis un terrien moi. C'est pour ça, la [région], tout ça, c'est pas chez moi ici. Là-bas, c'est ma terre, je suis un terrien. Et puis en plus, comme je vous l'ai dit, je suis un lépidoptériste ; les papillons, il y en a plein chez moi, on est sorti, il était 5-6 heures du matin et nous sommes rentrés, il était 22 heures passées. On a fait l'aller-retour dans la journée, 1000 km dans la journée

, Je peux essayer si vous voulez, si vous avez des questions plus précises? Eh bien, c'était plus, Donc, vous

, En plus, je vais vous dire, où je suis allé? ils m'ont fait un plan pas possible. Cette première incarcération s'est très, très mal passée. J'étais ultra-violent, je dis bien ultra-violent, j'ai insulté tout le monde, les matons, les mecs, je me battais sans arrêt? Je me souviens d'avoir cassé la gueule à un mec, Heu, 5 ans de taule, il faut les faire, croyez-moi, 4 ans et 4 mois. J'en voyais pas le bout, croyezmoi

J. , Je suis arrivée le [?] à [?], en [?], et j'en suis parti le [?], où, figurez-vous, j'ai cassé une autre porte. Parce que pas calmé du tout, ultra-violent aussi, j'ai cassé la gueule à un mec, j'ai voulu en crever un aussi qui me faisait chier tous les matins, tous les matins à 5-6h du matin, il tapait dans le mur. J'étais tout seul en cellule, j'ai été 15 jours avec un garçon -un jockey, je me souviens -qui avait une toute petite, toute petite peine de rien du tout, qui avait commis un petit vol et qui avait été libéré en provisoire ; il a fait 15 jours avec moi, voilà, sinon, j'étais tout seul. J'ai cassé une deuxième porte. Là, j'ai moins fracassé, J'ai descellé le gond d'en haut. Et j'ai payé la porte aussi. Voilà. Alors, ils m'ont sorti de la cellule, ils m'ont gazé ; le chef, il avait une grosse bonbonne de gaz, il m'a gazé la gueule à 1 mètre, j'en ai pris plein la gueule, j'en avais plein les yeux, plein la bouche, enfin bref. Ils ont mis 10 minutes pour me descendre au mitard, croyez-moi, j'étais accroché aux rambardes et tout, mais je ne voyais plus rien, je les insultais de tous les noms. Ils ne m'ont pas cassé la gueule, mais ils ont essayé, Quand je suis arrivé au mitard, ils m'ont arraché toutes mes fringues, tout, ils m'ont tout arraché jusqu'aux slip, à poil, ils m'ont tout arraché. Et il y avait un robinet, je me suis rincé pour enlever le gaz, et toute la peau partait. La peau, elle partait, ça m'avait brûlé complètement

. «-rentre, !. De-saloperie-!-rentre-!-rentre-!-rentre, . Viens, T. Viens, . Vas-voir-!-»-et-je-le-voyais-hésiter et al., Il est venu plusieurs fois, il est venu au moins 4 fois avec la barre de sondage, il ne pouvait pas, il fallait un Bricard tu vois, mais il était là quand même, mais il était là quand même et je lui disais « Rentre ! Rentre, espèce de saloperie ! Tu vas voir ta gueule, Enfoiré !

, Ensuite, ils m'ont transféré à [?] pendant un mois et demi, du [?]au [?], et là ils m'ont fait un cadeau magnifique. Ces enfoiréslà, comme ils me considéraient comme un taré complet, comme j'étais ultra-violent, ils m'ont envoyé dans une centrale, ils m'ont envoyé | XVI dans une centrale qui n'existe plus aujourd'hui

. Il and . Vraiment, Parce qu'à l'époque, le service médical faisait partie de la prison, ce qui n'est plus le cas depuis 1994, si mon souvenir est bon, mais à l'époque, non. Et là, j'ai tout de suite compris que j'étais en danger, j'ai vraiment compris tout de suite que j'étais en danger, j'allais super pas bien, mais devant cette espèce de fou de psychiatre, là, qui était vraiment un taré complet, je suis arrivé avec un sourire, comme ça, j'ai fait « Tout va très bien dans le meilleur des mondes, monsieur ». Et j'ai échappé à la fiole. Parce qu'à l'époque, les médicaments se donnaient dans des fioles, les matons faisaient le tour des cellules et donnaient la fiole, et le mec buvait son truc, là, devant le surveillant. À Haguenau, ce n'était pas comme ça, ils vous chopaient à la sortie des ateliers, il y avait une passerelle, les deux matons étaient posés là avec la petite caisse avec toutes les petites fioles, les mecs étaient vraiment dangereux. Moi, j'étais un ange à côté d'eux. Et là, je me suis calmé, parce que là-bas, ils te shootaient. Ecoute-moi bien, on était 60 dans le quartier. Le lendemain de mon arrivée, on est deux à arriver, on est deux ce jour-là

, Il y avait encore ça, il y avait encore l'extinction des feux à 10h le soir, extinction des feux à 10h le soir, paf ! Ils vous coupaient, il n'y avait pas de télé, il n'y avait rien du tout. Ils vous coupaient le courant à 10h le soir, voilà. Il n'y avait pas de sport, il n'y avait pas d'activités, il n'y avait rien du tout, il y avait que dalle ! Il y avait juste une salle commune où il y avait une télé, voilà. Vous pouviez y aller l'après-midi, de telle heure à telle heure, ça devait être de 14h30 à 18h, un truc comme ça? Une salle commune où il y avait des problèmes, des bagarres, ? Et à l'époque, il y avait encore les tenues pénales. Les tenues pénales, le costume gris, les pompes noires, la chemise jaune avec le col pelle à tarte et tout, là

, Et c'est là que vous avez fini votre peine ?

N. Alors, Vous êtes détenu, donc vous êtes nécessairement un manipulateur, un menteur. Mais c'est dans toutes les taules comme ça, c'est toujours comme ça, aujourd'hui. Mais ça m'avait beaucoup marqué à l'époque « se dit primaire ». Mais non, espèce de sale con, je suis primaire, je suis primaire, je ne vais pas te raconter que je suis primaire si je ne le suis pas ! « Se dit primaire », voilà. Horrible cette taule. Donc je croise ce chef -donc j'ai tiré 14 mois dans cette taule -un mois ou deux avant de partir, je croise ce chef et qui me dit, il discute un petit peu avec moi et il me dit « B., mais vous n'avez rien à faire ici vous ». Alors je m'étais calmé hein ? parce que là-bas, le moindre incident, ils vous descendaient 3 jours, 3 jours minimum, dans une cellule capitonnée. Ils ne vous mettaient pas au mitard, ils vous mettaient dans une cellule capitonnée et ils vous shootaient, ils vous faisaient une piqûre et ils vous shootaient, et vous étiez défoncé pendant des semaines, Oh ! J'ai une anecdote à vous raconter à ce propos. C'est pour vous donner une idée de comment vous êtes traités, vous allez voir

C. , Et puis là, tout équipé, grand terrain de sport, et tout. J'ai même repris une licence de football, on pouvait jouer au foot à l'intérieur de la taule, il y avait une dérogation de la part de la fédération, on pouvait faire les matchs aller et retour. Un match retour, normalement, on le fait à l'extérieur, on va chez l'adversaire, mais là non, les matchs aller-retour

|. Xviii,

;. ?]-?-alors and . Reparler-de-[?], J'entends les portes s'ouvrir pour la cour de promenade, et moi je suis juste derrière la porte. Vous avez intérêt à être derrière la porte parce que le maton, il ouvre, si vous n'êtes pas derrière, il ferme et puis pas question de taper à la porte pour dire « Hé ! Hé ! Hé ! Je veux sortir ! », non, il ne revient pas. Je suis derrière la porte et je suis en train d'accrocher mon truc (montre la fermeture éclair de son blouson) comme ça, je suis encore dans la cellule, et là, le surveillant ouvre et il me dit « Oh ! accrochez votre truc là ! » C'est ce que je suis en train de faire, Parce que toutes les taules dont je vous parle

, Et c'est une anecdote parmi des centaines d'autres qui, à la fin, vous atteignent vraiment

. Oui and . Fait, vous êtes allés à Fresnes ?

. À-chaque-peine, Quand j'étais à [?], est-ce que j'y suis allé ? Non. Non, non. J'y suis allé, donc sur ma première peine, ça d'accord, sur ma deuxième aussi, et j'y suis passé deux fois sur ma dernière peine. Voilà, c'est ça. Ça fait 4 fois, dont l'avant-dernière fois où je suis resté 1 an. Un an bloqué à ne pas pouvoir sortir, enfin bon, bref? Donc, sur ma première peine

, Il y avait de l'espace, et puis je jouais au foot, et puis Il y avait de l'espace, et le régime était quand même assez libéral, et les surveillants étaient tranquilles, pas de souci. On avait un directeur qui était un peu cinglé, mais bon, ça va, ça a été, ça s'est bien passé, Donc là, relax, ça a été plus calme là, j'ai été beaucoup moins violent

. Là, Donc ça, c'est ma première peine

. Ça, Donc après, il y en a eu deux autres? Il y en a eu deux autres, ouais. Et ensuite, il y a la peine de 24 ans ? Ouais? Alors, j'ai pris 30 ans

, Et sur mes 30 ans avec 20 ans de sûreté, j'ai fait 24 ans, 1 mois et 13 jours

, Et là, vous avez fait la majeure partie à [P.] ou? ? | XIX

, Figurez-vous que certains surveillants se souvenaient que j'avais cassé la porte dix ans auparavant. Donc, un qui me menace, qui me dit « Mais c'est toi qui a cassé la porte, là-bas » et je lui dis « Non, c'était celle-là, là ». Ah ouais, parce que je m'en souviens. En fait, il était en train de me menacer, c'est-à-dire qu'il allait me faire des vacheries autant qu'il allait pouvoir. Sauf qu'il est tombé dépressif et il s'est foutu en arrêt longue maladie, il n'a jamais pu se venger sur moi

, Vous me parliez des établissements vous aviez fréquentés, en fait

. Oui and . Alors,

, Je suis tombé dans un traquenard pas possible, je me suis fait défoncer dans une cour de promenade, j'ai failli mourir? Enfin, bon, passons, les raisons sont trop complexes à vous expliquer. J'ai failli crever. Des dents cassées, la colonne vertébrale pétée, enfin deux vertèbres pétées, enfin bref, En maison d'arrêt. Ensuite, j'ai été transféré pour des raisons sécuritaires à [?] où j'ai failli me faire tuer tout simplement

, En fait, je suis la plus grosse peine depuis un siècle, je suis la plus grosse condamnation depuis un siècle en

, Donc, pour des raisons sécuritaires, on me transfert à [?], donc j'ai fait un mois et demi là-bas, le temps de me faire assassiner à moitié, là, et de là, je pars en transfert à [?], à [?] où je suis resté un an. Un an où j'étais obligé de rester en cellule, obligé. Je suis resté un an dans une cellule

, Sans sortir, dans un bloc de béton

. Obligé, parce que c'était trop dangereux pour vous de sortir, ou parce qu'on vous demandait de rester ? Trop dangereux pour moi. À cause des raisons pour lesquelles j'étais en prison

, Donc vous n'êtes jamais sorti pendant un an

. Voilà, Sauf les 6 semaines où je suis passé au CNE, le CNO ça s'appelait à l'époque, Centre national d'observation

?. Vous and . Xx,

. Oui and . Oui,

C. Quartier, Comment évaluer quelqu'un dans un cube de béton ? Dans un cube de béton, dans des conditions comme ça ; vous venez de choper une peine pas possible, vous êtes malheureux comme les pierres, vous êtes complètement dépressif et vous êtes censé aller bien ! Alors voilà, vous êtes évalué par des psy, des psychologues, des psychiatres, on vous fait passer des tests psychotechniques, enfin tout ça, pour vous orienter, c'est n'importe quoi, n'importe quoi ! Et ça, où les gens sont censés vous orienter sur telle ou telle taule

, Une fois que vous êtes condamné définitivement

, Une fois que vous avez eu le verdict et que vous savez que vous allez en prendre pour 30 ans, quoi

. Voilà, Au-dessus d'une peine de 10 ans, d'une peine supérieure ou égale à 10 ans, vous passez systématiquement par le CNE. Ça s'appelle le CNE maintenant, c'est de la novlangue. Avant, on appelait ça le Centre national d'observation, maintenant c'est le centre national d'évaluation. Ça me fait marrer, mais bon? Bref. Donc, je suis passé là-dedans pendant 6 semaines, et de retour en division 2 dans un des quartiers de

, Et là vous étiez tout seul en cellule ?

N. Non, Je vais vous en raconter un quand même, ça vous donne une idée de la vie en cellule. Moi, je ne sortais pas je ne pouvais pas sortir, mais lui il sortait en promenade le matin et l'après-midi. Et la promenade le matin, c'est 8h 8h15, par là. Donc, il se lève comme tous les matins et qu'est-ce qu'il fait ? La première chose qu'il fait, il va aux toilettes. Donc, il va faire sa grosse commission aux toilettes. Alors, je ne vous dis pas, en milieu carcéral, hein, c'est extrêmement gênant, d'ailleurs un des problèmes des détenus, c'est la constipation, parce que vous n'arrivez pas à | XXI déféquer devant les gens ou à côté des gens, c'est extrêmement gênant. Moi, ça m'a toujours posé beaucoup de problèmes ça, moi je ne me suis jamais habitué à ça, en fait moi j'allais aux toilettes quand il n'était pas là, quand il était en promenade. Mais combien de fois ça m'est arrivé d'être en doublette, voire en triplette, avec des gens et d'être obligé d'aller aux toilettes, alors c'est extrêmement... donc vous n'y arrivez pas, quoi, vous avez des gaz -pardonnez-moi, hein, je suis désolé -et puis, c'est extrêmement gênant, ça chlingue, Ça pose des problèmes terribles d'ailleurs, parce que tu peux très bien tomber... enfin, tu tombes sur n'importe qui

«. Oh, !. Qu-;-dépêche-toi, !. ». Tu, . Moi, !. Dans-mon-lit-«-dépêche-toi-!-»--«-ouais et al., Un jour, je suis tombé sur un mec comme ça, c'était? Ça, c'est sur ma deuxième peine, je suis tombé sur un mec, il est resté 2 mois avec moi, c'était un type qui n'arrêtait pas de se couper. Alors ça, c'est une maladie de taulard ça, des gens font des tentatives de suicide, ils se coupent. Vous voyez énormément de gens en milieu carcéral avec des cicatrices, il y en a plein, des gens qui ont des coupures comme ça, voilà, ils ont tenté de se suicider. Alors voilà, c'est des appels au secours, voilà. Sauf que le garçon avec lequel j'étais, lui, c'était pathologique chez lui. Je vous garantis madame. Sur son bras là, ici, ces deux bras d'ailleurs, ici, dans le cou, sur les cuisses, et tout. C'était une boucherie, vous m'entendez ? Il s'était tellement coupé que ses cicatrices, ça faisait des bosses et tout, il s'était coupé des dizaines et des dizaines de fois, il avait une énorme cicatrice ici, là, je ne sais pas comment il ne s'est pas coupé la carotide. Alors lui, un jour, je remonte de promenade -ça, c'était à [?] c'était sur ma deuxième peine, ça, à [?], à côté de [?] -je remonte de promenade, il m'avait bousillé toutes mes affaires, tous mes bouquins, tout ! Il m'avait tout fracassé, il avait été foutu au mitard, je n'ai plus jamais revu celui-là. Heureusement, parce que je l'aurais défoncé, il m'avait explosé tous mes bouquins, tous mes bouquins sur les insectes, il les avait tous bousillé, cet enfoiré-là ! Il a pété un plomb. Enfin, bref. Et ce garçon-là, je le voyais régulièrement devant la glace, il se regardait devant la glace et? Parce que j'étais là, est-ce que tu fais toi ! Va te laver les mains ! Oh, mais c'est? (crie) Va te laver les mains ! » Bah oui quoi vous avez des gens sales, quoi. Et alors, donc, mon jockey, là, 72 balais, il se lève, il est 8h-8h15 par là, et il est en retard, il est à la bourre il est encore sur le trône et les portes commencent à s'ouvrir pour la promenade, et ça va vite, le surveillant, il a des dizaines et des dizaines de cellules à ouvrir, c'est extrêmement grand, vous n'imaginait pas, c'est grand comme la rue là, les deux ailes, c'est gigantesque. Alors, je l'entends ouvrir et je lui dis « Papy

E. Et-arrivé, Donc, après la maison d'arrêt, là, sur votre plus longue peine, vous êtes arrivé directement à P

. Donc, on reprend sur ma dernière peine, donc ? Ouais, votre dernière peine

. Donc,

?. Mais and . Celuilà, Vous avez les islamistes, alors, ces gens-là ont juste envie de vous assassiner parce que vous êtes le mécréant, vous êtes? Voilà, j'ai rencontré des intellectuels du Coran, vraiment, et des gens qui faisaient du prosélytisme et tout, et c'est d'actualité aujourd'hui. Moi, je l'ai vu de très près, ça, de très, très près, comment ces gens-là pratiquaient. Voilà, donc, un milieu extrêmement violent aussi et une tension, une tension, une tension? Mais des deux côtés

, Et 7 ans où vous travailliez ou? ?

J. T. Oui, J'ai des petites périodes où j'ai pas travaillé, parce que soi il n'y avait pas de boulot, soit parce que j'étais pas bien dans ma tête, par exemple quand je suis arrivé au CP de

C. Ça, Alors, j'ai tout fait, j'ai absolument tout fait. J'ai été buandier, j'ai été cantinier, j'ai fait ça pendant plus de 2 ans, j'ai été auxi d'étage, j'étais auxi à l'avancée. Pendant 2 ans, je travaillais à l'extérieur de la tôle, je pouvais m'en aller quand je voulais, quoi, voilà, c'était un chantier extérieur dans le cadre d'un aménagement de peine

, Ça, c'était sur ma fin de peine

, Donc, vous étiez à P. à ce moment-là ?

P. Là and . Voilà,

. ?], V. Et-un-jour, . ;-?]--la-directrice, and R. Madame, cette dame ! (pouce levé) Très proche des détenus, mais aussi des surveillants. Elle a fait beaucoup de bonnes choses pour nous, et elle avait une collègue, qui était sous-directrice, Madame V. Et puis un jour, elle me croise dans les couloirs, on tape le bout de gras, on discute, voilà, et elle me dit « Mais [?], pourquoi est-ce que vous ne partiriez pas en transfert ? » Alors je lui dis « Les transferts, ras-le-bol ». Les transferts, c'est une humiliation, c'est les chaînes aux pattes, aux pieds

, eh bien, j'ai tiré 13 ans et demi, voilà. 13 ans et demi. Où j'ai craqué complètement, je suis allé au mitard je ne sais trop combien de fois, en 6 ans de temps sur les 13 ans -après je me suis calmé -sur les 13 ans

, Et pourquoi ? Qu'est-ce qui faisait que vous étiez comme ça ?

. Fidèle, Je sais que ça le gêne un peu ce que je dis, mais c'est la réalité. C'est le monsieur le plus adorable qu'on connaisse, tout le temps présent, fidèle, loyal. Et combien de services il nous a rendu, ce cher [V.], combien de service, combien de service ? Et à moi? Il m'a fait traverser toute la France, par exemple. Grâce à lui, bah oui, c'est pas rien de faire ça. Voilà. Donc, pendant les 6 premières années au CP de [P.], j'ai chopé plus de 35 rapports d'incident. Donc je descendais au mitard une, 2 fois, 3 fois par an au mitard. Catastrophe. Et puis il est arrivé un moment où, je ne sais pas, j'ai rangé mon fusil, je l'ai enterré. J'ai enterré la hache de guerre, on m'a fait changer de quartier, je suis allé au quartier [C], c'est un quartier dit de confiance. C'est Madame J. qui m'a beaucoup aidé. Alors, d'habitude, lorsque vous allez au quartier, Parce que j'ai pas du tout? Je ne sais pas, j'ai décompensé. Les matons ne me traitaient pas de la même manière, mais ça, c'est une anecdote que je raconte souvent, mais un jour, un surveillant -je venais d'arriver -un surveillant m'a réveillé à coup de pompes dans la lourde. Il m'a réveillé à coup de pieds dans la porte. En centrale, c'est juste pas possible ça ! Parce qu'en centrale

, Mais j'en pouvais plus. Vraiment, je n'en voyais plus le bout, je n'en pouvais plus. Et puis, à cause du mitard j'ai perdu de longues années, je suis sorti au bout de 24 ans, mais, en réalité, j'aurais dû sortir au bout de 20 ans. J'ai perdu 3, 4 ans de taule à cause de | XXV tout ça, de liberté je veux dire, à cause de tout ça. Ouais, ce n'est pas rien. Voilà, je me suis calmé du jour au lendemain. Du jour au lendemain, je me suis calmé, Et puis, du coup, vous n'étiez pas loin de la fin de votre période de sûreté. Ça, ça a joué ou pas ? Alors oui aussi

J. Madame,

J. Madame, Alors, c'est une chef

, Une chef de bâtiment

. Quand, . B], and G. Détenu, qui voulait devenir femme, qui prenait des hormones, d'ailleurs. Et il se coupait des morceaux de sexe, c'était terrible ! Je l'ai vu marcher comme ça (mime), dans la cour de promenade, c'était horrible. Et là, elle s'est fait opérer et elle est mariée avec P. C'est le premier mariage en milieu carcéral, toutes prisons confondues

. Non, en était? Donc là, vous êtes arrivé sur P., ça a été compliqué pendant 6 ans, après vous partez au quartier [C] et ça va beaucoup mieux

, Oui, alors, j'ai préparé ma sortie environ un an, un an et demi avant de sortir. Alors préparer

. Qu, est-ce que ça veut dire, préparer ? Ouais, ça ne veut pas dire grand-chose? Est-ce que vous étiez accompagné par un CPIP à ce moment-là ?

. Ah, . Oui, G. Madame, and G. Madame, un excellent personnel, Madame G, qui est une femme comme ça, très compétente, absolument gentille, très honorable. Elle m'a beaucoup aidé, elle me suit encore, elle est venue me voir dans mon appartement il n'y a pas très longtemps, elle me suit encore

, Vous êtes sorti quand ?

. Oui and . Récent?,

. Oui, est tout récent, ça fait 2 mois. C'est tout neuf. Mais j'ai la prison dans la tête encore, madame, vous savez? Oui

. Oui, tout est là encore, vous savez, bien présent encore. | XXVI Et donc, vous avez eu des aménagements de peine ? Des permissions ?

. J'ai-eu..-;-**************-et, Les seuls aménagements de peine que j'ai eus, ce sont des permissions. Enfin, je travaillais à l'avancée, c'est un aménagement de peine, c'est un chantier à l'extérieur. Parce que vous êtes dehors, hein, il suffisait d'emprunter le trottoir et puis je m'en allais. J'étais chargé de rentrer toutes les denrées alimentaires qui arrivaient sur palette, voilà, entre autres choses, mais c'était mon boulot principal, rentrer de la nourriture, que ce soit pour les cantines ou pour les cuisines. Il y avait deux, trois autres trucs à faire, nettoyer les bâtiments, sortir les paquetages des libérables, enfin bref, des petites choses comme ça, mais essentiellement rentrer les denrées alimentaires donc, qui arrivent par palette. On rentrait ça au pied du quartier [B], on passait par le chemin de ronde, ça, c'était mon boulot

G. Bah, Pour le moment, j'attends une réponse, on m'a dit un mois un mois et demi. Je suis allé à Pôle Emploi, donc, je leur ai présenté ça, et on m'a dit « Ils vont vous convoquer d'ici un mois et demi ». Bon, j'attends toujours, bon c'est avec eux que je vais bosser pour avoir un travail j'imagine, voilà. Mais pour le moment, stand-by. Et Madame G. s'est beaucoup impliquée pour que je n'aille pas en foyer, mais pour que j'aie un logement. Sans elle, vraiment

. Oui, Vous, vous n'êtes pas passé par le foyer ? vous êtes directement allé en appartement ? Non, je suis allé directement en appartement

, Et est-ce que vous pouvez me raconter votre sortie ? Ce que vous avez ressenti ?

, Déjà les 5, 6 derniers mois que j'ai passés en prison, j'étais dans un état d'angoisse, d'anxiété épouvantable. L'anxiété, c'est quelque chose qui me domine, moi. D'ailleurs, je suis sous traitement. Mais là, vraiment je me posais, mais alors, un milliard de questions, même encore aujourd'hui, je suis un handicapé social, je ne sais plus rien faire, Très dur. Très, très dur. Très très, très dur

. C'est-À-dire, Un téléphone, je ne sais même pas comment ça marche ; l'informatique, j'y connais rien ; des administrations, je me demandais comment j'allais faire, où ça se trouve, comment on fait, qu'est-ce qu'on dit, comment ça se passe, qu'est-ce que je vais avoir à faire, quelle démarche je vais avoir à faire? Je ne savais rien de rien et ça générait des crises d'angoisse terribles, terribles ! Et je suis sorti dans un état d'anxiété épouvantable, madame, mais là, je crois que ça a été le pire de tout. J'étais malade comme un chien, malade de chez malade. D'ailleurs, j'ai une anecdote à vous raconter. Dans la même semaine, avec Madame G., nous allons dans un organisme -je ne sais plus lequel -pas très loin de chez moi, à 500 mètres de chez moi, Mais tout, madame, tout ! Mon beau-frère est venu avec ma soeur pour m'installer des meubles dans mon appartement. S. me dit « Bah tiens, prends le tournevis » et machin, mais | XXVII je me suis dit « Je ne vais pas y arriver, je ne sais plus

!. Épouvantable, anxiété épouvantable ! Je me demandais ce qui allait m'arriver. Vous vous rendez compte ? Un quart de siècle de prison ! Je ne savais plus rien, non

, Et est-ce que, depuis deux mois, là, vous avez l'impression que, petit à petit, vous reprenez un peu pied ?

. Petit-À-petit,

. Là, Ça, ça m'inquiète beaucoup encore. Bon, les administrations tout ça, j'ai fait, j'ai reçu un papier de la CAF hier, je ne sais pas quoi en faire, je ne sais pas ce que ça veut dire, il faut que je téléphone à ma conseillère parce que je ne sais pas ce que c'est. Voilà il y a plein de trucs

, Est-ce que physiquement, ou même sur le plan sensoriel, au niveau de la vue, de l'ouïe, tout ça, est-ce que là vous avez senti que la détention avait eu des effets ?

. Oui and . Oui, Il y a énormément de détenus qui ont des problèmes de vue, parce que vous n'avez qu'une vision à court terme, vous avez les murs ou les grilles, les grillages devant vous, les barreaux devant vous

. Ouais and . Tout-À-fait.-l'ouïe, En maison d'arrêt, ça, ça arrive très souvent. En maison d'arrêt, il y a beaucoup de problèmes d'eczéma, de psoriasis, de choses comme ça. Ça, c'est des décompensations

, Et par rapport à l'espace, est-ce que ça, c'est quelque chose, quand vous êtes sorti? ?

B. S. Oui, Et en milieu carcéral, c'est plat, vous marchez sur du plat, mais là, il n'y a pas que du plat là, et je bute

, après, j'ai encore des petits soucis de ce genre-là. Sinon

O. Oui, ai pris la liberté, quoi, en pleine figure, quoi ! Les bagnoles de partout, les gens de partout

. Trop, C'est pour ça que j'ai disjoncté, d'ailleurs, complètement. En plus de l'anxiété de savoir toutes les démarches que j'avais à faire, qui m'attendaient tout ça, j'ai vraiment disjoncté. Vraiment. Vraiment, j'ai perdu les pédales complètement. J'ai oublié cette journée-là. C'est fou

, Et est-ce que vous pensez -alors, peut-être pas, là, je n'induis rien -, mais si les choses s'étaient faites plus progressivement?

. Oui and . Préféré, Mais c'est ce que je leur ai dit avant de partir, il ne faut pas faire ça, surtout pour les longues peines comme moi, il faut absolument aménager les peines bien avant, bien avant la libération pure et dure. Moi, je pense que deux, trois ans avant, il faut commencer à faire des choses, des permissions, à être accompagné en ville, commencer à apprendre à faire des démarches administratives. Mais c'est pas possible, on vous l'interdit, on vous l'interdit. Par exemple, le RSA, vous ne pouvez pas engager des démarches avant de sortir, voilà, vous perdez du temps à des choses comme ça. Ça, il faut absolument que ça change, quoi. Non, il faut absolument préparer ça bien avant que ça ne s'est fait pour moi, parce que pour moi, ça s'est fait dans l'urgence en réalité. Les deux derniers mois que j'ai passés, j'ai été inondé de papiers

C. Trop, il faut que vous signiez ça, Ah [?], vous avez reçu ça, vous allez voir Madame untel? » Ah là, là, c'était trop d'un coup, vol.48

U. Ouais and . An, deux ans, mais vraiment, il faut vraiment le faire, et il faut lâcher les gens petit à petit, il faut leur donner des permissions les accompagner pour faire des démarches administratives, voilà, il faut que ce soit possible

, Et un accompagnement? ?

Ç. Alors and . Existe, Je fais des sorties accompagnées d'une dame qui s'appelle madame B., qui travaille à l'INFREP, je ne sais pas si ça vous dit quelque chose? Oui

, on va repérer un petit peu la ville, mais c'est pas? C'est pas vraiment du concret. Voilà, c'est sympa, c'est bien, il faut le faire aussi, mais ça ne suffit pas quoi. Elle m'a appris à faire fonctionner ça, le téléphone, Qui fait des sorties ponctuelles, comme ça, mais c'est sur un après-midi ou une matinée, on va visiter tel coin dans la ville

, Et avoir quelqu'un qui vous accompagnerait, justement, sur -je ne sais pas -disons 3 mois, mais de manière très régulière, pour faire, justement, ces démarches, pour se réhabituer un peu?

. Ouais, ce serait une très bonne idée. Ouais, c'est ce qu'il faudrait faire, ouais. | XXIX Et ça, aujourd'hui, ça n'existe pas ?

. Non and . Non, Vous avez des permissions, bien sûr, vous avez des permissions où vous faites ce que vous voulez -je ne sais pas -ouvrir un compte, voilà, des choses comme ça. Alors, c'est vrai que j'ai pu le faire, moi, j'ai une perme où j'ai pu aller ouvrir un compte, voilà, bon, c'était toujours ça de gagné. Mais bon, ce n'est pas tout, quoi, et il y a encore d'autres choses à faire, il y a pleins de trucs à faire. Et puis, ne serait-ce que reprendre contact avec la vie, quoi, voilà. Par rapport aux autres personnes que vous pouvez rencontrer aujourd'hui, est-ce que, dans le contact, vous êtes plutôt, non. Il faudrait le faire, il faudrait absolument que ce soit mis en place, mais non, ça ne marche pas comme ça

. Oui, ai des relations avec des gens, mais le tissu social que j'ai autour de moi, ce n'est pas le bon. Tous les gens que je connais sont affiliés à la prison. Tous ceux que je connais, que je rencontre

, C'est tous des gens que j'ai connus en prison. Je ne connais personne d'autre à part des gens

. Voilà, Comment faire ? Je n'y arrive pas. Alors, il faudrait peutêtre que j'adhère à des associations, je ne sais pas, que je fasse de la randonnée, que je rencontre des gens via je ne sais trop quel truc, je ne sais pas, mais pour le moment, ce n'est pas le cas

M. Ouais and . Je-suis?-enfin, Je le vis mal ça, je ne le vis pas bien. Je suis tout seul devant ma télé, dans mon appartement

, Après, le travail peut aussi vous aider à ça?

, Mais comment trouver du boulot avec le passif que j'ai, quoi. Quel est le patron qui va accepter de prendre un gus comme moi, qui a un curriculum vitae avec un trou de 24 piges, quoi. Même si j'ai toujours travaillé, quoi, mais le travail en milieu carcéral, c'est un petit machin que vous mettez dans un machin que vous mettez dans un autre machin, vous reprenez le même petit machin que vous remettez dans un machin, voilà, et ça pendant 6h de suite, c'est complètement décérébré, c'est pas du travail intellectuel quoi, ça vous vide la tête d'ailleurs, ça vous rend dingue. Tout est comme ça. Et en prison, vous passez votre temps à attendre, attendre? Vous devenez fou d'attendre, vous en devenez dingue, dingue. Dingue, dingue, dingue. Le temps, il est palpable. Moi, je me rappelle, Alors, j'attends ça avec impatience. Dès que j'aurai du boulot, là, je vais sûrement pouvoir rencontrer des gens autres

, 10 ans de faits je me disais « Non, c'est pas possible, c'est pas vrai, il me reste plus du double à faire encore, non ». Pfff. Palpable, le temps palpable, hein, ce n'est pas qu'une vue de l'esprit. Ça n'avançait pas

. Là, ai terminé par rapport à mes questions. On a fait un peu près le tour

, Pourtant, j'avais encore tellement de choses à dire, je ne vous ai pas raconté le millième de ce que j

, Mais je me doute

, Mais si j'ai pu vous apporter quelques réponses, ça me fait plaisir, madame

!. Ah and . Oui,

, Mais on peut se rencontrer de nouveau si vous voulez, pour affiner? Pourquoi pas? Bah, il faut que je voie, là, j'ai encore

. Bah and . Moi,

. Ouais and . Bah, Après il faut que je retranscrive tout, donc ça, ça va prendre un peu de temps, c'est surtout long, mais c'est intéressant, c'est ce qui permet, là, je vais finir, déjà, les deux entretiens qu'il me reste à passer

. Écoutez, vous avez mon numéro de téléphone, n'hésitez pas à me rappeler, je suis à votre disposition. Mais vraiment, ça me ferait vraiment plaisir. En plus, vous êtes une personne tout à fait charmante

M. ,

. Mais-oui, Si vous avez envie de me revoir au mois de janvier, n'hésitez surtout pas à me rappeler. Je pense que j'ai encore beaucoup de choses à vous dire. Je me permets d'insister, madame, n'hésitez pas, n'hésitez pas

, Pouvez-vous me décrire vos principaux rôle et missions ? 2. Pouvez-vous me décrire les modalités de votre accompagnement des détenus de longue peine (avant leur sortie) ? Après leur sortie ?

, Qu'elles sont les difficultés les plus prégnantes que vous avez eues à observer chez les personnes sortant de longues peines (supérieures à 5 ans) en termes de réinsertion ?

, Pensez-vous qu'un travail (ou formation) et un hébergement, bien que vecteurs d'insertion sans conteste, soient suffisants pour accompagner la réadaptation sociale des détenus de longues peines ?

, Les SPIP ont-ils les moyens nécessaires pour accompagner cette réadaptation sociale ? Quand, selon vous, serait-il le plus pertinent de commencer cet accompagnement ? Par l'utilisation de quelles ressources ?

, Le maintien des liens familiaux (ou, a minima, d'un tissu social) constitue-t-il selon vous un facteur décisif de réinsertion ? autrement dit, la rupture de ces liens constitue-telle un risque majeur d'échec ?

, De manière plus générale, quel regard portez-vous sur la question de l'atermoiement de la peine après la sortie (nécessaire justification des « trous

, Quels sont vos principaux partenaires sur le territoire ? Estimez-vous qu'ils soient suffisants ? Dans quel cadre les sollicitez-vous ? Pour répondre à quelles problématiques ?

, Vous arrive-t-il d'être à court de solutions en termes d'accompagnement des anciens détenus de longue peine ? | XXXIV

, La dernière réforme pénitentiaire 2018-2022 instaure les SAS (structures d'accompagnement à la sortie), avec 2000 places annoncées, notamment pour les détenus de longues peines en fin de peine. Pensez-vous ce dispositif pertinent ?

, Cette même réforme instaure les « quartiers de confiance ». Cela fait-il, pour vous, écho avec le bâtiment [C] du CP de [P.], que les détenus eux-mêmes qualifient de « bâtiment de confiance » ? Pensez-vous que ce bâtiment facilite la future réinsertion des détenus ? Pourquoi ?