Train-train
Résumé
Les gares deviennent aujourd’hui un espace central dans nos vi(ll)es. Les flux d’usagers en font l’expérience routinière, c’est leur « train-train » quotidien. « Train-train » ? Comment se fait-il qu’on en soit venus à utiliser le mot « train », à l’origine plutôt symbole de mobilité, de vitesse et d’exploration, pour caractériser une routine monotone, ennuyeuse et banale ? Là où le train – et la gare, par extension – représentaient il y a encore un siècle les ultimes avancées de la mobilité et du progrès, ces mots désignent aujourd’hui une morne cadence répétitive. À l’origine, l’expression ne viendrait pas du mot « train », mais dériverait du verbe « trantraner », qui n’existe plus dans le français actuel et qui signifiait « se promener çà et là sans but ». L’expression a glissé dans le langage en perdant toute sa saveur d’impromptu erratique pour virer à la fadeur d’un déterminisme sans joie.
Le « train-train » qui a évolué avec ce glissement de sens traduit cette réalité paradoxale des gares contemporaines : la vitesse constante constitue aujourd’hui notre routine. L’expression fait écho à une récurrence, mais aussi à quelque chose d’ennuyeux, une carence sourde dans l’expérience quotidienne, une attention manquante qui empêche les flux qui transitent chaque jour dans les gares de s’y épanouir. Comment réveiller cette attention ? Comment transformer cette pratique pesante et répétitive en une expérience qui retrouverait un peu de la légèreté aventureuse du terme d’origine ?
Origine : Fichiers produits par l'(les) auteur(s)