CONTEXTE : En France, la prévalence de l’obésité est passée de 5 % en 1981 à 10 % en 2003 avec une augmentation plus rapide chez les agriculteurs et ouvriers que dans les catégories socio-professionnelles supérieures, aboutissant à des inégalités sociales de santé. Les campagnes d’éducation nutritionnelle n’ont cependant pas permis d’enrayer cette progression. Les trois-quarts des généralistes considèrent que c’est leur rôle de mettre en place une prise en charge préventive sur le plan nutritionnel mais rapportent de nombreuses difficultés à le faire. OBJECTIF : Nous voulons comprendre comment les médecins identifient ces difficultés, s’ils en rapportent, et leurs façons de faire, en pratique quotidienne, pour mettre en place un suivi nutritionnel. MÉTHODE : Nous profitons d’une enquête qualitative plus générale sur les pratiques préventives d'une centaine de médecins généralistes franciliens, pour analyser 21 entretiens de médecins portant sur la nutrition. RÉSULTATS : Des difficultés peuvent survenir à tous les niveaux de la prise en charge, à débuter par ce qui se passe en amont : histoire personnelle et trajectoire professionnel du médecin, héritage socio-culturel et rapport de chaque patient avec son alimentation et son poids, contraintes matérielles imposées par le système de soins primaires en France (consultations rémunérées à l’acte). Il s’avère que les médecins, même lorsqu’ils sont spécialisés dans ce domaine (de façon formelle ou pas) identifient presque tous la prévention nutritionnelle comme un soin difficile à mettre en place mais le sentiment d’efficacité découle de l’attitude du praticien vis-à-vis des échecs probables et donc de sa conception de l’éducation thérapeutique (accompagnement vs. combat, dialogue vs. paternalisme).