Depuis les années 1970, on assiste à une amplification des migrations de femmes seules des pays du Sud et de l'Est qui viennent travailler dans le secteur des services domestiques, notamment dans les pays du Nord. À cette époque, des femmes mauriciennes empruntent les filières migratoires des employées de maison, initiant alors les mouvements migratoires mauriciens vers la France. Cette recherche met en évidence le rôle de ces pionnières de la migration dans les changements des rapports de genre et de l'ethnicité, à travers l'analyse des récits biographiques de cinq femmes mauriciennes arrivées comme employées de maison dans les années 1970. En abordant leur histoire par le travail domestique hérité de mère en fille, il s'agit de souligner comment elles envisagent autrement en migration leurs conditions de travail et leur profession, et comment elles conquièrent, de manière singulière, le droit à bénéficier d'un temps et d'un espace privés. En déconstruisant les couples dichotomiques continuité/discontinuité, tradition/modernité, l'étude des « projets migratoires genrés » permet de comprendre les stratégies des femmes migrantes par lesquelles elles repensent leur place dans les rapports de genre, malgré les contraintes du réseau migratoire du travail domestique qui naturalise leurs compétences.