Le coton (Gossypium spp.) comprend quatre espèces domestiquées de façon indépendante : deux espèces diploïdes, G. herbaceum en Afrique et G. arboreum dans le sous-continent indien, et deux espèces tétraploïdes, G. hirsutum en Amérique centrale et G. barbadense au Pérou. La compréhension de l’histoire des diffusions de ces cotons est limitée par le fait que les graines, régulièrement trouvées en contexte archéologique, ne peuvent être déterminées au rang de l’espèce en se basant uniquement sur des observations morphologiques. Cette étude explore donc le potentiel des analyses morphométriques, traditionnelle et géométrique sur des graines modernes afin d’extraire un signal taxinomique pouvant être appliqué à un matériel archéologique. Le corpus moderne est composé de variétés des quatre espèces domestiquées de coton, provenant de culture sous serre (Montpellier, CIRAD) et en plein champ (Espagne et Arabie Saoudite). Des spécimens de graines de l'Herbier datant des 19e et 20e siècles sont également pris en compte. Le corpus est complété par des graines archéologiques du site soudanais de Mouweis (période méroïtique, 1er-4/5e siècles ap. J.-C) et du site saoudien de Madâ’in Sâlih (période nabatéo-romaine, 1er-4/5e siècles ap. J.-C). Du fait de la conservation par carbonisation des spécimens archéologiques, des carbonisations expérimentales ont été effectuées sur les graines modernes afin d'évaluer l'impact de la carbonisation sur la forme des graines. La forme des graines moderne et archéologique a été capturée à l’aide de deux approches. (1) Des mesures linéaires (morphométrie traditionnelle) et (2) des analyses de contours, Landmark et sliding semi-Landmark (morphométrie géométrique). Ces approches permettent de discriminer les espèces diploïdes des espèces tétraploïdes et de différencier les espèces au sein du corpus moderne. La carbonisation des graines n’affecte pas cette discrimination taxonomique et maximise les différences. L’approche actualiste comparative semble rapprocher les graines archéologiques de l’espèce G. herbaceum sans pour autant l’affirmer clairement. Ces données offrent de nouvelles hypothèses sur les dynamiques de circulations du coton en Afrique et dans la péninsule Arabique durant l'Antiquité.