Introduction : La Guyane constitue une plaque tournante du trafic de stupéfiants entre l’Amérique du Sud et l’Europe. Le transport in corpore ou Body-packing est un des transports privilégiés par les narcotrafiquants. L’Office Anti-Stupéfiant (OFAST) estime qu’en 2018, 577 personnes ont fait passer de la cocaïne de la Guyane à la France métropolitaine, contre 183 en 2014. Le passage de cocaïne in corpore nécessite systématiquement une prise en charge hospitalière mais les recommandations internationales à ce sujet sont pauvres et discordantes. Les objectifs de cette étude sont la description épidémiologique du Body-packing en Guyane et l’évaluation de la prise en charge du Body-packer. Matériels et méthodes : Étude observationnelle rétrospective mono-centrique incluant les patients admis au service d’accueil des urgences (SAU) et à l’Unité Médico-Judiciaire (UMJ) du Centre Hospitalier de Cayenne (CHC) du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2019 pour ingestion in corpore de boulettes de cocaïne. Les patients pour lesquels le transport in corpore de cocaïne a été infirmé ont été exclus. Les données ont été extraites du dossier des urgences puis ont été comparées par tests statistiques entre différents sous-groupes de population : avec complications (geste endoscopique ou chirurgical, manœuvres de réanimation ou survenue du décès), ou sans complications. Résultats : Sur la période de 4 ans, 668 personnes ont été adressées au SAU et à l’UMJ du CHC par les services des douanes pour suspicion de body-packing. Parmi elles, 215 ont été exclues devant l’absence de boulettes à l’Abdomen Sans Préparation (ASP) et 4 patients ont été exclus car porteur de boulettes de cannabis. In fine 449 patients ont été admis pour ingestion d’ovule de cocaïne soit une augmentation de 60% par rapport aux années précédentes. L’âge moyen était de 25.2 ans avec un Sex ratio H/F de 2.21. Parmi eux, 13.7% se sont compliqués sans mise en jeu du pronostic vital. Le nombre de boulettes moyen était similaire entre la population avec et sans complications (respectivement 54.1 [50.9-57.4] et 57.8 [48.9-66.6], p=0.22). La présence de cocaïne dans les urines n’a pas montré de lien significatif avec des complications (OR 0.5, IC95% [0.1-1.8], p=0.238). En comparaison au scanner (gold standard), la sensibilité de l’ASP était de 44.1. La durée moyenne de séjour était significativement plus longue si l’ASP initial présentait 50 boulettes ou plus (p=0.0001). Conclusion : Cette étude a montré un faible taux de complications, dont une majeure partie seulement pour recours à l’endoscopie. Les durées moyennes de séjour sont relativement courtes, du fait du faible taux de complications et de l’absence de gravité de celles-ci. L’emballage de type 3 de qualité micro-industrielle, quasi exclusivement utilisé dans le body-packing dans la région Guyane, semble être le principal facteur à cette réduction de complications. Ce constat a permis de proposer une adaptation du protocole de prise en charge des Body-packers.