Écriture collective et immédiat communicatif dans les lettres privées de femmes peu-lettrées du XVIIIème siècle
Résumé
The British National Archives in London is home to a collection of archive documents called the Prize Papers – over 160.000 documents including private letters, but also diaries, ledgers, bills, and even drawings, poems and playing cards. Seized by the British Crown between 1652 and 1817 in the context of the practice of prize-taking – an early modern naval practice designed to target enemy nations’ economic activity by looting the merchandise on their commercial ships – these documents were kept as proof that the prize was “lawful”, i.e., not a result of piracy. This dissertation looks at a corpus of 23 letters composed by women – all varying degrees of unskilled writers – between 1752 and 1793. It aims to contribute to the field of discourse analysis and historical sociolinguistics by exploring the idea of “collective writing” as a new (discursive) facet of the oral quality often attributed to the private writings of unskilled writers. Through the analysis of different aspects of what I call collective writing, I have shown that this concept too is subject to hybridity in its relationship to orality; elements of both conceptual orality and conceptual literacy (or communicative immediacy and communicative distance, as defined by Koch & Oesterrreicher 2001) can be found. In this corpus, however, I have observed a propensity for conceptual orality through the prevalence of attributes of communicative immediacy such as spontaneity, “public” communication, and referential anchoring.
Les Archives Nationales du Royaume-Uni conservent un fonds d’archives nommé les Prize Papers : plus de 160 000 documents dont des lettres privées, mais aussi des carnets de bord, des registres, des factures, des dessins, des poèmes, ou encore des cartes à jouer. Saisis par la couronne britannique entre 1652 et 1817 dans le contexte de guerres de course (une pratique militaire visant à affaiblir les nations ennemies en saisissant leurs navires marchands), ce sont les pièces à conviction disculpant le Royaume Uni de piraterie. Avant tout exploitée par les historiens, cette ressource est encore peu utilisée dans la recherche en linguistique historique, en particulier dans le domaine francophone, malgré la prévalence des documents français dans les Prize Papers. Ce mémoire s’attache à l’analyse discursive d’un ensemble de 23 lettres rédigées par des femmes peu lettrées entre 1752 et 1793, explorant l’idée d’écriture collective comme potentielle nouvelle facette de l’oralité conceptuelle souvent attribuée aux écrits privés des personnes peu lettrées. Les résultats de l’analyse des différentes réalisations de ce que nous appelons l’écriture collective montrent une hybridité dans leur rapport à la scripturalité ou l’oralité conceptuelle (ou la distance et l’immédiat communicatif). Néanmoins, l’on peut observer dans les lettres que les attributs de l’immédiat communicatif (tels que la spontanéité du discours, la communication « publique », ou encore l’ancrage référentiel) dominent par rapport à ceux de la distance communicative.
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