La danse classique a longtemps souffert d’une image stricte, réservée et élitiste, et toujours quelque peu aujourd’hui. Pourtant, son approche tend à se démocratiser avec des actions facilitant l’accès à la culture, sa présence lors d’événements ou dans des espaces ouverts au grand public, et puis avec des maques, comme Repetto, qui s’en emparent et la réinterprètent.
Repetto, depuis ses débuts, fait figure de référence dans la fourniture de tenues et de chaussons pour le ballet, avec un savoir-faire reconnu. Repetto a ensuite fait évoluer son offre au fil du temps, suivant une idée précise : conquérir le monde urbain sur un segment assez haut de gamme. Nous étudions ici son approche singulière dans l’incorporation de deux univers qui n’ont, à priori, rien en commun : la danse classique et la ville. Il faut alors résister à la tentation de les poser comme deux domaines étrangers l’un à l’autre.
La question posée ici est de savoir comment Repetto met-elle en scène sa volonté de démocratiser la danse classique tout en conservant ses marqueurs et en s’inscrivant sur le segment de la mode haut de gamme ?
Nous replaçons d’abord l’Opéra, comme institution de la danse classique, dans une perspective historique. Depuis sa volonté de construction, à sa fréquentation, l’opéra est un lieu majestueux, riche et codifié, large source d’inspiration pour Repetto. Plus que dans son identité de marque, les espaces marchands de Repetto sont une réappropriation de l’enceinte de l’opéra. Les produits sont exposés – presque individuellement – aux côtés d’anciens tutus de scène – à « ne pas toucher ». Repris, détournés et réadaptés, les codes de l’opéra sortent de leur enceinte pour offrir une nouvelle accessibilité.
Le cadre ainsi défini, les contours de Repetto se dessinent comme une marque médiatrice. Médiatrice d’une culture, d’un patrimoine de ballet et médiatrice d’une urbanité. Par différents supports de communication, de publicité, de présence, par ses produits, Repetto exprime son rôle de médiateur et traduit son expression à la rencontre de deux univers qu’elle se réapproprie et qu’elle associe.
Enfin, Repetto se retrouve sur le devant de la scène avec une visibilité accordée par des célébrités, une place de choix dans les médias et des événements qui captent leur public. Une telle image place ainsi Repetto auprès des grandes maisons de mode, s’inscrivant ainsi sur le segment du luxe. Le portefeuille de produits, leur mise en exposition et leur patrimonialisation en témoignent aussi. Ces codes haut de gamme sont tirés par l’image de la danse classique, contrebalancés par la marque qui cherche à conquérir un public urbain. Repetto sort le ballet de l’opéra et la ville accueille l’élégance de la danse dans sa dynamique. Repetto joue sur cet équilibre entre volonté de démocratisation et conservation des codes prestigieux.