Mémoires Année : 2024

Portraits de ressuscités

Charlène Lamy
  • Fonction : Auteur
  • PersonId : 1505726
  • IdRef : 282139974

Résumé

Introduction: Voluntary ballistic facial injuries present major surgical, relational, and emotional challenges for both patients and caregivers. The destruction of the face affects not only appearance but also the sense of identity and social integration. This study aims to assess the impact of disfigurement on the quality of life of individuals who attempted suicide by firearm and the role of surgical strategies in the adaptation mechanisms developed by these patients. Materials and methods: A cohort of 110 patients who survived a suicide attempt by firearm and were treated at the Amiens University Hospital between 2004 and 2024 was analyzed. The data collected allowed for the measurement of survival and recurrence rates as well as an epidemiological study of pre- and peritraumatic characteristics. The study was then supplemented by nine semistructured interviews conducted by a psychiatrist-surgeon team to shed light on the origins and aftermath of such a radical act. This qualitative study was supported by quantitative scales: HAD, C4, and FACT-MBIS/McGill. Results: The suicide recurrence rate was only 3%, with an immediate mortality rate of 10%. Among survivors, 57.8% underwent complex and extensive facial reconstructions. The interviews revealed that early family trauma was the starting point for a flawed identity construction, amplified by a deep-seated and disrupted sense of shame, leading the patient to seek to "kill" their face in order to resurrect a visage they could reclaim. Scores on the scales highlighted good individual and social adaptation despite the disability.Discussion: The results show that disfigurement allows for the reshaping of a previously unstable social environment, becoming a decisive step in the identity reconstruction process. Furthermore, surgery acts as a guide, helping the patient in their development by creating a secure environment. Surprisingly, patients with fewer facial sequelae seem less inclined to reinvent themselves than those with major disfigurement, perhaps because the process of deconstruction/reconstruction could not fully conclude. Conclusion: The clinical profile of patients who attempt suicide by ballistic facial trauma is counterintuitive, as our study highlights a paradoxical improvement in the quality of life for disfigured patients. The surgical journey allows them to progressively reimagine themselves, both literally and figuratively.
Introduction : les traumatismes balistiques volontaires de la face sont des défis chirurgicaux, relationnels et émotionnels majeurs pour les patients, comme pour les soignants. La destruction du visage affecte non seulement l'apparence mais aussi le sentiment d'identité et l'intégration sociale. Cette étude vise à évaluer l'impact de la défiguration sur la qualité de vie des suicidants par arme feu et le rôle de la stratégie chirurgicale dans les mécanismes d'adaptation élaborés par les patients. Matériels et méthode : une cohorte de 110 patients, ayant été victimes d'une tentative de suicide par arme à feu, et traités au CHU d'Amiens entre 2004 et 2024, a été analysée. Les données recueillies ont permis de mesurer les taux de survie et de récidive ainsi que de réaliser une étude épidémiologique des caractéristiques pré et per traumatisme. Puis l'étude a été complétée par 9 entretiens semi-directifs, menés par un binôme psychiatre/chirurgien afin d'éclairer les origines et les suites d'un geste si radical. Cette étude qualitative a été appuyée par des échelles quantitatives : HAD, C4, FACT-MBIS/McGill. Résultats : le taux de récidive suicidaire était seulement de 3%, avec une mortalité immédiate de 10%. Parmi les survivants, 57,8% ont subi des reconstructions faciales complexes et lourdes. Les entretiens révèlent que les traumatismes familiaux précoces sont le point de départ d'un défaut de construction identitaire, amplifié par une honte primaire et déréglée qui conduit le patient à vouloir tuer sa figure pour voir ressusciter un visage à se réapproprier. Les scores obtenus sur les échelles mettent en avant une bonne adaptation individuelle et sociale malgré le handicap. Discussion : les résultats montrent que la défiguration permet de remodeler l'environnement social préalablement instable et s'avère donc une étape décisive dans le processus de reconstruction identitaire. Par ailleurs la chirurgie agit comme un tuteur et permet de guider le patient dans son développement en créant un environnement sécurisant. Étonnamment, les patients ayant peu de séquelles faciales semblent moins enclins à se renouveler que ceux en état de défiguration majeure, peut-être parce que le phénomène de déconstruction/reconstruction n'a pu s'achever. Conclusion : la clinique des patients suicidants par traumatisme balistique de la face est contre-intuitive car notre étude permet de mettre en évidence une amélioration de la qualité de vie paradoxale des patients défigurés. Le parcours chirurgical leur permet notamment de se réenvisager progressivement, au sens propre comme au sens figuré.
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Charlène Lamy. Portraits de ressuscités. Chirurgie. 2024. ⟨dumas-04834178⟩
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