Le corps en mouvement comme interface chez Nanni Moretti : de la violence à l’harmonie. Étude de Bianca (1983), La messe est finie (1985), Palombella Rossa (1989), Journal Intime (1994) et Aprile (1998)
Résumé
Le corps étant le réceptacle des contrariétés et des joies du personnage, sa posture et ses mouvements sont à même d’en dévoiler l’état émotionnel. Au cinéma, ces gestes sont accompagnés par des effets de mise en scène qui, nous le verrons par l’analyse de scènes tournées par Moretti, inscrivent les émotions dans la matière filmique, les rendant ainsi perceptibles à qui veut bien y être attentif. La présence du corps morettien se ressent d’autant plus intensément lorsqu’il est en total rejet de ce qui l’entoure ou, au contraire, quand il s’accommode pleinement de sa situation. Comme nous le verrons tout d’abord, le premier cas se caractérise par des émotions négatives violemment exprimées. Les émotions négatives ressenties par les personnages sont primitives en cela qu’elles génèrent des élans irraisonnés. Elles sont révélées par des gestes spontanés que le corps n’est pas en mesure de réprimer. L’harmonie en revanche en passe par un apaisement de la pensée qui guide le corps dans des mouvements doux qui ne blessent ni le personnage morettien ni ceux qui l’entourent. En lutte avec l’environnement dans lequel il évolue, le personnage se trouve dominé par une colère l’empêchant de (se) raisonner. Le début de notre étude sera l’occasion de cibler les origines des peines ressenties et les différentes formes que prennent les manifestations de celles-ci. La propension à la violence du personnage morettien ne se contentant pas de punir les individus qu’il côtoie, il nous faudra observer des scènes où son corps est malmené à son tour. Nous verrons par la suite que les films du corpus ménagent heureusement des espaces dans lesquels se glissent des possibilités d’apaisement. Cette harmonie est progressivement obtenue au moyen d’éléments filmiques épaulant le personnage dans son cheminement. Le premier à être observé sera la bande-sonore, dont la création et l’agencement par le cinéaste contribuent à sceller l’état d’esprit et de corps dans lesquels se trouvent les personnages. Nous constaterons finalement que l’apaisement des émotions se déploie spatialement, les déplacements du corps rendant compte de la disposition émotionnelle des personnages. Enfin, ces différents états seront interrogés au regard des relations sociales auxquelles parviennent les personnage morettiens (...)
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